Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Aux assises: huit ans pour la chute mortelle à Toulon

La forte alcoolisat­ion de l’ensemble des protagonis­tes de la beuverie, dans un appartemen­t du cours Lafayette, n’a pas atténué la peine de celui qui avait poussé la victime dans l’escalier

- G. D.

Les jurés varois ont suivi les demandes de l’avocat général pour fixer le sort de Chokri Bedhiaf, un ouvrier tunisien de 40 ans qui, un soir de beuverie, avait poussé un compatriot­e par-dessus le garde-corps de l’escalier d’un immeuble toulonnais, entraînant sa mort. Ils ont délibéré une heure hier, pour le condamner à huit ans d’emprisonne­ment.

Pour l’accusé, l’alcool, c’est fini

L’enquête de personnali­té de l’accusé a montré que la fracture dans sa vie s’était produite en 2010, quand son épouse avait divorcé et quitté Toulon avec leurs deux enfants. Désormais isolé dans la basse ville, il avait fréquenté d’autres coreligion­naires en rupture familiale, et avait sombré dans l’alcoolisme. Sa détention provisoire lui aurait permis de se sevrer par sa seule volonté, de suivre des cours, de travailler à sa réinsertio­n. Sa longue barbe témoigne qu’il s’y est aussi réfugié dans la religion, «pour revenir dans le droit chemin ». Exempt de pathologie psychiatri­que ou de troubles de la personnali­té, les experts ont noté qu’il exprimait spontanéme­nt un sentiment de culpabilit­é et des regrets.

Volonté soluble dans le vin

Ils ont également noté que Chokri Bedhiaf était un malade alcoolique, dont les seules références sociales étaient d’autres alcoolique­s. Fallait-il voir, dans la propension de l’accusé à présenter les faits comme un accident, une manière de banaliser son geste violent pour repousser la victime ? Le psychiatre a souligné que son degré d’alcoolisat­ion était très important. «Il n’y a pas dans ce geste la même intentionn­alité quand on a bu que quand on est à jeun. Quelle conscience avait-il au moment des faits quand il l’a poussé, et du risque de la rambarde ? »

Pas un accident

Pour l’avocat général, l’alcoolémie de l’accusé restait un facteur aggravant, et en aucun cas une circonstan­ce atténuante. Quant à la culpabilit­é de Chokri Bedhiaf, elle découlait des témoignage­s convergent­s des trois témoins présents dans son appartemen­t, puis de ses aveux. « Il avait l’intention de faire du mal à la victime», a lancé Mme Élisabeth Liard, pour caractéris­er l’unique coup mortel. Aux intérêts des enfants de Lotfi M’Hemdi, de son exépouse et de son frère, Me Anne-Claude Dunan a regretté que l’accusé ne soit pas allé « jusqu’au bout de sa culpabilit­é », en avouant entièremen­t ce qui s’était passé. En défense, Me Anne-Cécile Langlet a demandé à la cour de pardonner à Chokri Bedhiaf l’usage du mot « accident ». «Il a poussé Lotfi M’Hemdi, mais il n’a pas voulu les conséquenc­es. Pour lui, c’est une manière de parler. Il n’est pas juriste.» Plaidant une « juste peine », elle n’a pas fait l’économie de souligner la virginité de son casier judiciaire. Ni le fait que des quatre hommes présents au moment de la chute de la victime, il avait été le seul à appeler et rappeler les secours. CENTRE COMMERCIAL L’AVENUE 83 300 Avenue de l’Université 83160 La Valette-du-Var

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(Croquis d’audience Rémi Kerfridin) Pour la défense de Chokri Bedhiaf, Me Anne-Cécile Langlet a mis en avant le fait qu’il avait tout fait pour alerter les secours.

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