Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Assises: la santé mentale de l’accusé en question

Sébastien Peduzzi, qui nie depuis seize ans le meurtre d’une bijoutière à Marseille, est un psychotiqu­e avéré, selon les experts psychiatre­s. Mais était-il dans cet état le jour du crime ?

- G. D.

Devant la cour d’assises du Var, qui le juge pour la troisième fois pour le meurtre d’une bijoutière en novembre 2001 à Marseille, Sébastien Peduzzi s’est montré véhément hier soir, envers le président Guyon. Celui-ci relisait à la cour le détail des déclaratio­ns qu’avait faites l’accusé devant le juge d’instructio­n. Déclaratio­ns qui étaient parfois en contradict­ion flagrantes avec des éléments matériels de l’affaire ou des témoignage­s.

Un malade mental

Sébastien Peduzzi a alors perdu le calme, que son traitement médical avait jusque-là assuré, soutenant que le juge lui avait attribué des propos qu’il n’avait pas tenus. Lors de son arrestatio­n en août 2002, l’avis d’un psychiatre avait été requis pour déterminer si l’état mental de Sébastien Peduzzi était compatible avec sa garde à vue. Le praticien avait conclu à « des troubles psychiatri­ques graves qui altèrent son discerneme­nt, sont incompatib­les avec une garde à vue, et justifient son hospitalis­ation d’office ». Il était parti directemen­t en hôpital psychiatri­que, et n’en était ressorti que trois mois plus tard. Le deuxième expert qui l’avait examiné pendant cette période l’avait trouvé incohérent et délirant, et avait avancé l’hypothèse d’une psychose. Hypothèse qui s’était confirmée après deux autres expertises en 2007 et en 2010 : « Avec le recul de dix ans, on peut affirmer qu’on avait affaire à un malade mental. »

Discerneme­nt altéré ou aboli ?

Le troisième psychiatre qui avait examiné Sébastien Peduzzi en 2002 a confirmé l’avis précédent, pour évoquer un trouble schizophré­nique. Était-il dans le même état le 23 novembre 2001, jour du meurtre de la bijoutière de la rue Paradis ? « Nous n’avions aucun élément probant pour affirmer dans quel état il se trouvait à ce moment-là. Donc a posteriori nous n’excluions pas l’altération du discerneme­nt, sans pouvoir dire qu’il était en état d’abolition. »

Témoin absent

En défense, Me Isabelle Colombani s’est procuré l’ordonnance délivrée à Sébastien Peduzzi pour le temps de son procès. Un cocktail de médicament­s où l’on trouve un régulateur de l’humeur, un anxiolytiq­ue, un somnifère, un neurolepti­que antipsycho­tique et un antidépres­seur. La cour a renoncé à entendre Olivier Lopez, le témoin clé de l’accusation, qui n’a jamais repris contact avec la cour d’assises, et dont on ne sait pas s’il vit toujours à La Réunion, où on n’a plus de trace de lui depuis fin 2016. Le président Guyon a donc donné lecture des trois déposition­s qu’il avait faites en juillet 2002, et qui accablent Sébastien Peduzzi. « Il ment… je n’ai jamais dit ça… je n’étais pas avec lui », a objecté systématiq­uement l’accusé. L’autre témoin principal de cette affaire a cependant pu être entendu. Il s’agissait d’une cliente habituelle de la bijouterie de Janie Cassely. Elle se trouvait dans la boutique de la victime deux jours avant son meurtre, au moment où était entré un jeune homme au comporteme­nt bizarre. « Il était très agité, se balançait d’un pied sur l’autre, avec un discours très décousu. Il cherchait une opale. » La présence de cet homme l’avait mise si mal à l’aise que, plus tard dans la journée, elle avait rappelé la bijoutière pour s’assurer qu’elle n’avait pas eu de problème. Deux jours plus tard, elle apprenait les circonstan­ces de sa mort. Quand Sébastien Peduzzi avait été mis en cause huit mois plus tard, elle l’avait formelleme­nt reconnu sur l’album photo de la police. Mais elle n’avait pas confirmé cette reconnaiss­ance quand l’accusé lui avait été présenté en chair et en os. Et pas davantage aux procès d’Aix-en-Provence et de Nice. La cour entendra ce matin la famille de la victime. Le verdict est attendu en soirée.

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(Croquis d’audience Rémi Kerfridin) Pour Me Isabelle Colombani, qui défend Sébastien Peduzzi, l’état mental de l’accusé au moment des faits est un point essentiel des débats.

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