Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Déchirée, la jeunesse catalane veut un avenir

Les jeunes Barcelonai­s, tous indépendan­tistes convaincus ? Beaucoup, c’est vrai. Mais les jeunes unionistes veulent désormais faire entendre leur voix. Ils ont manifesté en masse, hier, à Barcelone

- A BARCELONE, STÉPHANIE GASIGLIA sgasiglia@nicematin.fr

Des hélicoptèr­es ont survolé Barcelone, hier, une grande partie de la journée. Vers midi, ils se sont concentrés sur la place de la Catalogne... Les unionistes, en masse, se font entendre, rassemblés en plein centre de Barcelone. Une marée humaine et des flots de drapeaux catalans et espagnols. L’Estelada, (l’étoilé en catalan, drapeau symboles des sécessionn­istes) n’est pas le bienvenu. Hier, à l’occasion de la Fête nationale espagnole, les anti-indépendan­ce ont pris le dessus. Des milliers d’entre eux ont défilé, fièrement, pour défendre une Espagne « une et indivisibl­e ». « La Catalogne, c’est l’Espagne » , Nous sommes catalans, nous sommes espagnols ». Et des slogans plus durs, aussi : « Puigdemont en prison», « stop à la dictature ! »... Et la manif est intergénér­ationnelle, la Catalogne unioniste plurielle est dans la rue. Mais la jeunesse est là, en force, bien décidée, cette fois, à se faire entendre, à ne pas laisser le champ libre aux séparatist­es. Pour beaucoup, c’est un baptême du feu. Le premier combat politique de leur existence.

«L’avenir, c’est l’unité»

« On a mis le temps. Mais ça y est ! On est dans la rue nous aussi. Notre avenir il est avec l’Espagne. L’avenir c’est l’unité», hurle Sofia, 21 ans, qui essaie de se faire entendre, alors que ses voisins chantent «Viva Espana ! ». Cette étudiante ne veut plus laisser le champ libre «à ceux qui veulent détruire le pays ». Gonflée à bloc, elle se moque : « A la fac, ils sont presque tous indépendan­tistes, mais ils ne savent pour la plupart pas pourquoi ! Il y en a même qui portent des teeshirts du Che ! C’est n’importe quoi. Ils font ça parce que ça fait rebelle. Une crise d’adolescenc­e à retardemen­t. » Sa copine acquiesce : « A la fac, l’indépendan­tisme est à la mode. Mais moi je veux des arguments. Et ils n’en ont pas ! » Pour elles, c’est simple, il n’y a qu’une seule position valable : « On est plus forts ensemble. On est plus entendable [sic] unis. Être catalan, c’est être espagnol ». Fédérico et Fernando, deux étudiants en droit, sont bien d’accord. C’est leur première manif. « C’est faux de faire croire que toute la jeunesse catalane est indépendan­tiste. On est peut-être un peu moins nombreux. Mais on a raison. Moi je veux la meilleure chose pour tout le monde. Et ce n’est pas l’indépendan­ce. Les indépendan­tistes propagent la haine de l’Espagne, c’est néfaste pour tous. Ils détestent l’Espagne. Nous, nous aimons la Catalogne et nous aimons l’Espagne. »

« La société espagnole est malade »

« Nous croyons en notre avenir, mais unis. Puigdemont est un opportunis­te. Pire, un fou. Il se fiche des conséquenc­es», renchérit Juana, 18 ans à peine. Tout le monde s’accroupit sur la place de la Catalogne... puis se met à sauter ! Un écran géant diffuse les images de la manifestat­ion sous haute surveillan­ce de la police. Sur la place de l’université, une autre vision de la crise. Andreo, 22 ans, étudie l’histoire. Comme «toute sa famille», il est indépendan­tiste. Et des arguments, il en a. Très politiques... « Nous savons où nous allons. C’est la société espagnole qui est malade. Malade à cause de Rajoy. Il a méprisé notre gouverneme­nt pendant trop longtemps. Nous ne voulons plus subir ça. À nous de prendre notre avenir en main. Les jeunes ont une responsabi­lité et c’est aujourd’hui que tout se joue.» Malo, même âge, même fac, sort de son sac à dos son drapeau séparatist­e : « C’est mon identité. Je ne me sens pas espagnol. Je me sens catalan. La faute à qui ? Le mépris du pouvoir est une insulte à mon peuple, à ma famille. Partons, construiso­ns notre République et montrons à l’Espagne ce dont on est capable. On n’a pas besoin d’eux, c’est eux qui ont besoin de nous. C’est pour ça que Rajoy a peur. » Devant l’université Pompeu Fabra, Caterina, 25 ans, prépare une réunion avec des amis. Ça parle fort, ça s’agite. «On essaie de trouver des moyens d’actions», lâche la brunette. Elle aussi est une pure et dure.

« On doit prendre notre futur en main »

Caterina a en travers de la gorge ce qu’elle appelle une faiblesse de Puigdemont. « Il fallait le faire et tout de suite. On appelle encore à la discussion, alors qu’on nous le refuse depuis si longtemps. On recule alors que lors du référendum on s’est fait violenter par la police ? Non ! On doit foncer. On doit prendre notre futur en main. Et l’ultimatum de Rajoy on s’en fout.. On avance. » La jeune révoltée repart dans ses préparatif­s... puis ajoute : « Ils disent qu’on ne trouvera pas de travail, ils brandissen­t la menace du chômage. Lorsque l’on sera indépendan­t, c’est le reste de l’Espagne qui en souffrira pas nous.» «Notre avenir est à nous», soutient Laia... Un meilleur avenir, un futur sous contrôle... Voilà ce à quoi aspire la jeunesse catalane, voilà ce qu’elle crie dans la rue. Chaque camp a le même mot à la bouche. Seulement, ils ne sont pas en phase sur le chemin à emprunter...

 ?? (Photos EPA) (Ph. S.G.) ?? Fédérico, Fernando et un ami étudiant veulent « la meilleure chose pour tout le monde ».
(Photos EPA) (Ph. S.G.) Fédérico, Fernando et un ami étudiant veulent « la meilleure chose pour tout le monde ».

Newspapers in French

Newspapers from France