Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Jérôme Deschamps toujours au nom Deschiens

Sur scène hier et ce soir au Carré de Ste-Maxime et au cinéma dans Numéro Une ,le Deschiens en chef se réjouit de retisser des liens avec le public depuis sa mise en retraite forcée de l’Opéra Comique

- LAURENT AMALRIC lamalric@nicematin.fr

Les oeuvres de Flaubert reposent sagement sur les rayonnages de la médiathèqu­e maximoise. Voici que se pointe matinaleme­nt Jérôme Deschamps qui en dépoussièr­e les pages en adaptant à la sauce Deschiens Bouvard et Pécuchet ce week-end (des places sont encore disponible pour ce samedi) sur la scène attenante du Carré… Allure bonhomme, bretelles tendues, discours érudit… Celui qui fit les belles heures de Canal + et qui actuelleme­nt enfile le costard inhabituel du PDG sur grand écran dans le film de Tonie Marshall Numéro Une, est intarissab­le lorsqu’on le lance sur ses sujets de prédilecti­on. Top départ.

Quel est le secret du « couple » que vous formez ce soir avec Micha Lescot ?

Déjà il y a un contraste assez incroyable entre les deux physiques. Je suis plutôt rond, il est étiré. Il n’y avait pas non plus davantage de parenté entre nos parcours. Il se trouve qu’on s’est rencontré voici quelques années à la sortie du Tartuffe à l’Odéon, à Paris. Là, il m’a confié : « C’est grâce à vous si je fais du théâtre », tout comme son désir de travailler avec moi. J’ai donc pensé à lui lorsque j’ai monté Bouvard et Pécuchet, ce bouquin qui veut régler son compte à la bêtise tout en nous apprenant à l’aimer.

Comment adapter cette oeuvre de Flaubert ?

C’était audacieux car c’est un roman non dialogué très loin d’un spectacle de théâtre. Les adaptation­s faites jusque-là tenaient plus de la lecture… J’ai bien sûr vu celle avec Jean-Pierre Marielle et Jean Carmet à la télé. Mais là encore pour moi, malgré leur talent, ça ne marchait pas. Il y avait une voix off, des bribes de dialogue, etc. Je voulais une version où la rencontre de Bouvard et Pécuchet se passe devant nous, avec de vraies discussion­s ! J’ai aussi fait des choix en gardant la bonne et en lui adjoignant un compagnon métayer. Ce qui m’intéressai­t c’était de confronter ces deux « couples » en décalage total sur tout. Et puis, pour l’anecdote, la maîtresse de Flaubert, la poétesse Louise Colet, née Révoil de Servannes, était de ma

famille !

Dufilho avait refusé de tourner Le Miraculé de Mocky car il moquait sa foi. Pourriez-vous refuser un rôle par conviction ?

Dans la pièce on se moque des ecclésiast­iques avec les petits garçons, mais ça existe alors… En revanche, s’il s’agissait de participer à un spectacle avec des horreurs antisémite­s, xénophobes ou autres, bien sûr que je refuserais.

Avec les Deschiens, avez-vous inventé un langage ou est-ce juste la résonance de la rue ?

Disons que j’ai choisi certains éléments de langage des gens, sonores aussi, pour mettre en scène une sorte de musique faite de sons, dialogues…

Durant l’âge d’or des Deschiens, n’avez-vous pas songé aussi intégrer le petit écran ?

Non. Je les dirigeais derrière la caméra et je les trouvais tellement drôles, que ça ne m’est pas venu à l’esprit. C’était la famille. Je retrouve le même bonheur avec ma nouvelle compagnie. Pauline Tricot pourrait être la fille cachée de Yolande Moreau ! (rire)

Tous les ex-Deschiens ont-ils bien tourné ?

L’appréciati­on artistique est différente selon les uns et les autres… J’adore ce que fait Yolande mais d’autres se commettent – peut-être parce qu’il faut bien vivre – dans des films ou des choses qui ne sont pas formidable­s… Alors je suis un peu triste et je me dis avec le talent qu’il a, il pourrait faire tellement mieux… On parle toujours des mêmes – François Morel, Yolande… – mais il y en a aussi qui ne font plus grand-chose…

Atmen Kelif a trouvé « asile » chez Edouard Baer…

Oui… Il s’adapte. Il est souple. Il a envie de s’amuser partout. Mais je pense à Bruno Lochet que malheureus­ement l’on voit moins souvent. C’est un personnage tellement touchant, extrêmemen­t sensible, pudique, authentiqu­e… Alors parfois il décline certaines propositio­ns par peur de ne pas tenir le coup en terme d’émotion…

Que vous inspire l’évolution de Canal + ?

Il s’agit d’une autre maison à présent. C’est beaucoup lié à des questions de personnes… Avant il existait une humeur générale formidable. Une prise de risque, là où d’autres chaînes me disaient que les Deschiens ça n’était pas drôle… Bon, il reste des étincelles comme De Caunes et Yves Calvi que j’aime beaucoup. Un ami et le fils de Gérard Calvi, membre de l’équipe des Branquigno­ls (comme jadis Louis de Funès, Jean Lefebvre, Jean Carmet, Jacqueline Maillan ou Michel Serrault, Ndlr) que

j’adorais !

Canal + est une autre maison désormais” Je suis triste pour certains ex-Deschiens”

Vos quatre enfants nés de l’union avec Macha Makeïeff ont-ils suivi la voie artistique ?

Oui. Juliette est directrice artistique du théâtre de Pau et fait de la mise en scène musicale. Louise est en train de réaliser son premier longmétrag­e à Los Angeles. Arthur prépare un second spectacle après Les Métronaute­s. Le petit dernier, Félix,  ans, est aux Beaux-Arts et a fait le décor du spectacle de ce soir.

Quels projets en  ?

Je prépare une pièce et vais peutêtre jouer dans la prochaine de Yasmina Reza... Mais pour l’instant je suis vraiment dans Bouvard et Pécuchet qui me permet de retisser des liens avec le public après ma parenthèse à la direction de l’Opéra Comique.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France