Le tatouage dans la peau
Le premier Festival Tattoo in Toulon se tient aujourd’hui encore au Palais Neptune avec 80 tatoueurs. Rencontre avec des fous de peaux gravées en tous genres
Il y a ceux sur la peau desquels on peut lire comme dans un livre ouvert qui raconterait leur vie. Et ceux, plus nombreux encore, qui ne s’expliquent même pas à eux-mêmes le pourquoi de tel ou tel dessin. «Pas besoin de bagou, son épaule est tatoo », comme chanterait Etienne Daho. Voir cela de près une seule fois aide à comprendre l’impulsion et le rapport charnel qui se joue peau contre peau entre tatoué et tatoueur. Aujourd’hui encore, le salon organisé par l’association Esprit noir et blanc propose des animations, danses, concerts avec le chanteur guitariste Fabien Collet, ancien candidat de The Voice, Mia Dolls artiste playmate d’un célèbre magazine masculin...
Avec, répartis sur un peu tout le corps, des tatouages des scènes du Silence des agneaux, Massacre à la tronçonneuse, Ça, Devill’s rejects, La Maison des morts, Chucky (on en passe)... on n’a aucun mal à croire que Gauthier, ans, soit fan de films d’horreur depuis tout petit. La tronche hallucinée de Jack Nicholson dans Shining est en train de s’imprimer à l’arrière de sa cuisse sous l’impulsion de Laura, tatoueuse chez l’un des plus grands mondiaux, Tin-Tin. A part peut-être sur la plante des pieds, - on a vérifié -, et les fesses, - on le croit sur parole -, la place commence à être réduite pour caser de nouveaux films dans sa cinémathèque. « Il reste plus grand-chose », reconnaît-il humblement. On cherche plus précisément le Silence des agneaux. « Je l’ai sous le cou », montre-til en levant menton en riant. « C’est une culture, je pense. Le comique me fait rire, mais le film d’horreur me fait encore plus d’effet, précise cet homme plutôt charmant, qui passe son temps à plaisanter avec la tatoueuse et bosse dans l’événementiel. « C’est comme une petite collection, explique-t-il. Quand je vais voir l’artiste, l’idée est de laisser faire, à partir d’un thème. On fait aussi de belles rencontres. J’ai la chance d’avoir de très belles pièces et quelques merdes faites par de très bons copains, que je garderai, parce que ce sont de bons souvenirs ».
Youri, ans, a choisi des hérons, pour un tatouage qui lui prendra toute la jambe, « parce que je les trouvais jolis », explique-t-il. Son amie ‘‘Dorothypurple’’, qui réalise ce dessin, partage son point de vue. « Je pense qu’un tatouage, c’est au coup de coeur. J’ai moi-même des tatouages qui ne veulent rien dire. C’est juste qu’ils me plaisent ».
« Vous vous demandez pourquoi j’aime souffrir ? Parce que je suis maso ! », lance en plaisantant Thomas, Toulonnais de ans. Notre question est plutôt:« Pourquoi se faire dessiner un bouddha sur le bras ? ».« C’est une philosophie, pour moi le bouddhisme. Etant beaucoup allé en Thaïlande, c’est une religion que j’admire », explique-t-il, sans pour autant être bouddhiste.
Sa passion des tatous : « Je ne sais pas l’expliquer, réfléchit-il, mais j’aime le
faire ». Ses tatouages sont liés à sa vie de famille, ses différents métiers. On devine au ‘‘bioméca’’ sur son bras, qui désigne dans le jargon un tatouage représentant des pièces mécaniques, qu’il a été mécanicien.
Barnes, ans, nous lance un regard sévère. Comment ? On ne sait pas qui est Brennus, personnage qu’il est en train de se faire tatouer sur le bras ? « C’est un Gaulois qui a saccagé Rome », nous apprend le jeune homme originaire de Cannes. « J’aimais bien l’histoire du personnage, il a un côté un peu énervé. Je le connais parce que je lis beaucoup, c’est pour ça », nous rétorque-t-il. Avis à ceux qui pourraient croire que les tatoués ont une coquille vide à la place du cerveau. Barnes aime aussi le côté oeuvre d’art, auquel il assimile les tatouages, « quand c’est bien réalisé ». Et sur son épaule droite, cette représentation de saint Louis fait-elle allusion au roi féru de croisades ? « Ça n’a rien à voir, c’est parce que c’est quelqu’un qui a choisi une vie humble ». Comme avec l’histoire, un message de tatouage peut en cacher un autre…