Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Albert Dupontel adapte Au revoir là-haut

- PROPOS RECUEILLIS PAR PHILIPPE DUPUY jpdupuy@nicematin.fr

AU REVOIR LÀ-HAUT

D’Albert Dupontel (France). Avec Nahuel Perez Biscayart, Albert Dupontel, Laurent Lafitte. Durée :  h . Genre : comédie dramatique. Notre avis :

Surprise : Albert Dupontel abandonne la veine « comico névrotique » (sic) qui a fait son succès depuis Bernie jusqu’à Neuf mois ferme pour l’adaptation à gros budget d’un prix Goncourt. Et c’est une formidable réussite (voir Notre Avis) ! Rencontré au festival d’Angoulême où le film était dévoilé en avant-première, l’humoriste-acteur-réalisateu­r nous a expliqué pourquoi il s’était lancé dans cette aventure…

Qu’est ce qui vous a conduit à adapter le roman de Pierre Lemaître ?

J’avais lu le livre quand il est sorti et je l’avais trouvé super. Ça m’avait vaguement monté à la tête pendant quelques heures d’en faire une adaptation. Spontanéme­nt, en tournant les pages, je trouvais qu’il y avait des choses à faire. Mais l’entreprise, pas qu’elle soit titanesque, était quand même assez éloignée de ce que j’ai toujours fait et voulu faire : des films à budget raisonnabl­e pour ne pas subir la pression de la sortie. Je préférais me réfugier dans mes petits films comiquo-névrotique­s. Ça m’arrangeait bien… Je l’ai donc mis de côté. Et puis, c’est revenu. J’ai rencontré Pierre pour lui dire ce que j’avais vu dans son livre : un pamphlet élégamment déguisé sur l’époque actuelle. Il a confirmé et, du coup, je me sentais légitime à me lancer dans une adaptation.

Ce sont les résonances actuelles du roman qui vous intéressai­ent ?

Bien entendu ! J’ai toujours fait des petits films militants bénins. Je ne m’en suis jamais caché. Marcel Péricourt, que joue Niels Arestrup, c’est le type même du magnat de la finance qui domine le monde aujourd’hui et nous martyrise. Pradelle (Laurent Lafitte), c’est le trader sans scrupule. Heureuseme­nt, il y a le personnage joué par Nahuel Perez Biscayart : un génie ! Quelqu’un qui est hautement conscient de la valeur de la vie, des sensibilit­és et des relations humaines… Mais qui ne peut pas s’exprimer ! C’est Mozart qu’on assassine. Le poète qu’on tue… Enfin, il y a le narrateur, Albert Maillard, le pauvre gars que je joue : celui qui subit la vie, de génération en génération. Il est plus fruste que les autres, mais il finit quand même par comprendre… Et par réagir !

Les masques apportent une dimension artistique qui n’est pas dans le roman. Comment en avez-vous eu l’idée?

À travers le personnage d’Edouard, joué par Nahuel Perez Biscayart. C’est un surdoué à une époque de mutation extraordin­aire sur le plan artistique. Ça se passe à Paris et ça ne peut pas lui échapper. Il est au courant de tout. Il connaît la peinture de Picasso, le bidet Duchamp, les dessins d’Egon Schiele… Ce n’était pas compliqué d’amener toutes ces influences devant la caméra, où je savais qu’elles prendraien­t un relief fort. J’ai trouvé le moyen de le faire par le biais des masques que porte Edouard pour cacher son infirmité...

Pourquoi avoir ajouté un narrateur ?

Je ne pouvais pas raconter l’histoire à l’instant T, comme dans le roman. Utiliser la voix d’Albert Maillard permettait de raconter l’histoire d’Edouard du point de vue du commun des mortels. Et puis, une voix off, ça fait gagner du temps. Dans le bouquin, il y a dix pages pour décrire les rapports père/fils. Moi, j’ai juste le temps d’un flash-back ! Un film tiré d’un roman, c’est à la fois un vol et une vulgarisat­ion. Mais que la caméra, la musique et l’interpréta­tion permet parfois de sublimer…

Sans dévoiler la fin, pourquoi avoir modifié celle écrite par Pierre Lemaître ?

Pierre m’a confié qu’il n’avait pas voulu écrire celle que j’ai filmée, « pour ne pas faire roman de gare » . Je le comprends, mais ne pas la mettre dans mon film, ça aurait été dommage. C’est une scène que le spectateur attend...

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Navet Médiocre Moyen Bon Excellent Chef-d’oeuvre

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