Sécu : les jeunes au régime général
Le Premier ministre, Édouard Philippe, a annoncé, hier, la fin de ce régime spécial de sécurité sociale des étudiants qui existait depuis les années 70
Les étudiants vont désormais « pointer à la Sécu » comme tout le monde. C’était l’une des promesses de campagne du candidat Macron. Elle devrait devenir réalité dès 2018, du moins pour les nouveaux inscrits de l’enseignement supérieur: le Premier ministre, Édouard Philippe, a annoncé, hier, la fin du régime spécial de Sécurité sociale des étudiants. Au grand dam des deux principales structures mutualistes qui se partageaient ce « monopole » depuis le début des années soixante-dix. La LMDE et la MEP pour la région Paca (groupe EmeVia) servaient, en effet, de caisse spéciale d’assurancemaladie aux étudiants et leur proposaient en parallèle des complémentaires santés. Si les mutuelles étudiantes vont pouvoir continuer d’exercer cette dernière activité, l’inscription obligatoire à la Sécurité sociale se fera désormais directement auprès du régime général sans en passer par la LMDE ou la MEP.
Délais de remboursement « trop » longs
C’était une exigence forte de certaines associations étudiantes, notamment la Face 06, affiliée à la Fage, dont le président salue une « victoire » : « C’était une de nos revendications, explique Louis Voisin. À cause notamment des délais de remboursement extrêmement longs que pratiquaient ces mutuelles qui bénéficiaient d’une délégation de service public. Les remboursements pouvaient prendre plus d’un an et certains étudiants en étaient arrivés à ne plus se soigner pour des raisons financières. » Plusieurs rapports, de la Cour des comptes en 2012 puis du contrôleur des droits en 2015, avaient souligné les dysfonctionnements de ces mutuelles étudiantes. Particulièrement égratignée la LMDE, ex-MNEF, qui avait déjà fait scandale dans les années 90, avait été placée sous contrôle judiciaire à la suite des problèmes de gestion. « Le problème c’est que du coup on jette le bébé avec l’eau du bain » ,déplore Yannick Lloret, le président de la MEP, son principal concurrent dans le Sud-Est. Pour lui, cette réforme pose un certain nombre de problèmes : « Idéologique d’abord, puisque c’est un pas en arrière dans l’autonomisation de l’étudiant qui n’est plus un enfant et pas encore un travailleur, du moins salarié. Le régime spécial avait été créé pour permettre cet apprentissage de l’autonomie. » L’autre écueil devrait être économique. Le président de la MEP rappelle que les deux grandes mutuelles emploient environ «1500 salariés ». Quid de leur avenir ? Cantonné à la seule offre de complémentaire santé, l’avenir est beaucoup plus incertain. D’autant que selon Yannick Lloret, les étudiants ne devraient pas tirer grand avantage de cette réforme : « Ils vont se retrouver noyés dans le régime général et devront désormais faire la queue à la Sécu comme tout le monde. »
Exonération de cotisation
La LMDE insiste aussi sur le fait que les mutuelles étudiantes prenaient jusque-là à leur compte les programmes de prévention destinés à ce public particulier. Un argument qui pour le président de la Face 06 ne tient pas : «Ces budgets prévention étaient surtout des frais de communication qui servaient aux mutuelles étudiantes à s’assurer une plus grande visibilité », estime Louis Voisin qui n’hésite pas à crier « victoire ». D’autant plus que la ministre de l’Enseignement supérieure et ancienne présidente de l’université de Nice, Frédérique Vidal, a annoncé que le passage au régime général s’accompagnera d’une exonération de cotisations à la Sécu. Soit une économie de 217 euros sur les frais d’inscription de chaque étudiant... À moins que cette cotisation jusque-là obligatoire ne soit remplacée par une autre contribution, au CROUSS cette fois. L’idée serait, en effet, dans les tuyaux.