L’entrepreneur pollueur condamné à euros
Hanifi Akar, gérant des deux sociétés, BVS et 505, a été condamné, outre cette lourde amende, à remettre le terrain en l’état dans un délai de six mois
Le tribunal correctionnel de Draguignan a infligé hier de lourdes condamnations pécuniaires pour sanctionner l’exploitation d’une décharge sauvage de matériaux, qui de janvier 2016 à mai 2017 a défiguré une zone boisée à Tanneron.
Noria de camions
À l’origine de l’affaire, un premier rapport de la police municipale en juin 2016 avait établi le déversement, sur un terrain situé en zone protégée dans le massif du Tanneron, de quantité de déchets provenant du bâtiment et des travaux publics. Ce rapport s’accompagnait de photos, montrant les camions et engins de terrassement au travail sur le site. Dans la continuité, un procès-verbal avait été dressé à la suite d’une visite du site, réalisée le 30 septembre 2016 en présence du propriétaire, M. Hanifi Akar, par les services de la Dreal (direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement), de la DDTM.
Parpaings, ciment, bitume et carrelage
Selon ce document, le terrain avait été déboisé sur 2200 m2, pour recevoir des exhaussements constitués de terre et de déchetsduBTP. Selon le profil du terrain, l’amoncellement de ces apports variait d’un à trente mètres de hauteur, et empiétait sur une propriété voisine. Leur volume avait été estimé à plus de 30000 m3, cequi a été contesté par les prévenus. On y trouvait des parpaings, du ciment, du plâtre, du carrelage, du bitume ou des traverses SNCF. Autant de déchets soumis à une obligation de recyclage, dont le coût varie de 27€ à 40€ par tonne. Sur la foi de ce procès-verbal d’infrac- tion, le préfet du Var avait pris le 1er décembre 2016 un arrêté de mise en demeure d’arrêter ces déversements de déchets. Mais ils se sont poursuivis jusqu’en mai 2017, quand les camions ont été saisis lors d’une opération de gendarmerie.
Deux sociétés, un même gérant
Ces engins appartenaient à une société des Alpes-Maritimes spécialisée dans le terrassement, la Sarl BVS (Bâtiment structure villa), officiellement gérée par M. Louis Potelle, 80 ans. Selon l’enquête judiciaire, le gérant de fait de BVS était Hanifi Akar, un ressortissant turc de 52 ans, Louis Potelle n’étant qu’un prête-nom. Celui-ciaconfirmé à l’audience qu’il n’avait qu’un rôle de secrétaire et ne décidait de rien dans la marche de l’entreprise. Hanifi Akar était en outre le gérant de droit de la société civile immobilière 505, propriétaire du terrain remblayé en zone naturelle. Il a soutenu que les exhaussements avaient été réalisés avec de la terre apportée par BVS, qui était propre, d’après ce que lui avait dit Potelle. Et ce dans le but de planter des oliviers sur cette parcelle. Pour les représentants des services de l’État, les apports réalisés sur la zone étaient constitués de déchets pour lesquels aucune traçabilité n’a pu être établie.
Six mois pour tout nettoyer
Aucune demande d’autorisation n’avait été déposée à la mairie de Tanneron par le propriétairedu terrain. La mairie n’avait pas davantage de trace d’un projet d’oliveraie. Vidant son délibéré, le tribunal a suivi de près les réquisitions du procureur pour condamner, sur un plan personnel, Hanifi Akar à dix mois de prison et 60000€ d’amende, et Louis Potelle à dix mois avec sursis et 6000€ d’amende. Chacune des deux sociétés a été condamnée à 100000€ d’amende, avec affichage et publication du jugement dans le Var et les Alpes-Maritimes. La Sarl BVS a de plus été condamnée à la remise en état des lieux, dans un délai de six mois, sous astreinte de 400€ par jour de retard. Le tribunal n’a pas ordonné la confiscation des camions et pelleteuses, précisément pour permettre cette remise en état au plus tôt.