Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Meurtres de femmes: la défense sort le chronomètr­e

Devant les assises du Var en appel, l’accusé nie toujours les deux crimes qui lui sont reprochés. Sa défense estime qu’il n’avait pas le temps matériel de donner la mort à la deuxième victime

- G. D.

La cour d’assises du Var a quasiment bouclé hier soir l’instructio­n du procès en appel d’Abdelkader Amrani. Ce secouriste marseillai­s de 46 ans, demeurant à Rians, avait été condamné à trente ans de réclusion par les assises des Bouches-du-Rhône, pour les meurtres de deux femmes à Marseille: Henriette Bernardi en 2006 et Marina Ciampi en juin 2012. Deux crimes qu’il a toujours niés, et pour lesquels il est en détention provisoire depuis octobre 2012.

Une veuve modeste

La fille unique d’Henriette Bernardi, dont le corps en partie momifié avait été découvert à son domicile fin avril 2006, a évoqué à la barre la mémoire de sa mère. Retraitée, veuve depuis six ans, celle-ci était devenue dépressive après les décès en quelques années de ses parents et de son époux. Elle vivait d’une modeste pension, dans l’appartemen­t qu’elle occupait depuis près de cinquante ans dans une cité des quartiers nord, et dont elle ne sortait que pour aller au cimetière ou à l’église. Au courrier le plus ancien retrouvé dans sa boîte aux lettres, la date de son meurtre avait été estimée au 22 février 2006. Femme méfiante et peureuse, Henriette Bernardi n’ouvrait pas sa porte à des inconnus, à moins qu’ils ne représente­nt des services officiels. En février 2006 s’était déroulé le recensemen­t dans la cité qu’elle habitait dans le 14e arrondisse­ment. Abdelkader avait procédé seul à cette opération dans l’immeuble de la victime. Henriette Bernardi n’avait pour seuls objets de valeur qu’une collection de timbres et quelques pièces de 5 francs de 1960. Elle avait retiré une semaine auparavant à la poste les 500€ qui suffisaien­t à ses courses du mois. Que l’on n’a pas retrouvés.

Un psychopath­e intelligen­t

L’expert psychologu­e qui a rencontré Abdelkader Amrani dans les deux affaires lui a trouvé une double personnali­té. D’un côté, au plan social, celle d’un homme qui aide les autres à travers ses activités de secouriste à la sécurité civile. De l’autre, celle d’un psychopath­e angoissé face aux situations d’abandon par les femmes. Dans ces situations, il a un sentiment persécutoi­re auquel il répond par une extrême violence: «Cet homme à l’intelligen­ce moyenne supérieure met toute sa tête au service de pulsions très fortes. »

Le temps de tuer

En suspendant l’audience hier soir, il restait à la cour à se prononcer sur l’opportunit­é de plusieurs actes d’instructio­n supplément­aires demandés par Me Patrice Reviron en défense. Des actes visant à tenter de reconstitu­er le dernier message envoyé par Marina Ciampi à l’accusé, ou à déterminer un ADN masculin inconnu sur la scène de son meurtre. Pour la défense, Abdelkader Amrani n’a pas pu avoir le temps de tuer Marina Ciampi et d’organiser toute la mise en scène retrouvée par les enquêteurs. « On sait qu’à 18h35 elle est vivante. On sait qu’à 19 h 13 il arrive à son travail. Ça fait peu de temps, compte tenu du fait que les policiers ont établi qu’il fallait 33 minutes pour aller en voiture du domicile de la victime à la caserne de l’accusé. » L’avocat général Pierre Cortès aura sûrement son avis sur la question.

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(Croquis d’audience Rémi Kerfridin) Devant la cour d’assises du Var, Abdelkader Amrani proteste toujours de son innocence.

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