Var-Matin (La Seyne / Sanary)

La vente des pesticides Closer et Transform suspendue

Le tribunal de Nice a suspendu hier l’autorisati­on de mise sur le marché de ces produits accusés de présenter un risque pour les abeilles

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Le Transform et le Closer, déjà autorisés selon son fabricant américain Dow dans 41 pays, dont les États-Unis, le Canada et l’Afrique du Sud, avaient été autorisés à la vente fin septembre par l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses). Cette autorisati­on « est suspendue jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur sa légalité », a décidé hier le tribunal administra­tif de Nice, saisi par l’associatio­n écologiste Génération­s Futures (lire notre édition précédente) .« Dow fera un recours (...) devant le Conseil d’État », a réagi l’avocat de la société, Me Eric Nigri, qui s’est dit « étonné » de cette décision dont « les conséquenc­es immédiates sont, précisémen­t, un préjudice pour les agriculteu­rs français qui vont s’orienter vers d’autres produits qui n’ont pas un profil écotoxicol­ogique aussi favorable ».

« Des incertitud­es subsistent »

Les deux pesticides visés servent à traiter contre les pucerons les cultures de grands champs et les fruits et légumes grâce à une substance active, le sulfoxaflo­r, présenté par l’associatio­n comme « un néonicotin­oïde de nouvelle génération » sur la base de diverses études scientifiq­ues. Les pesticides de la famille des néonicotin­oïdes sont en passe d’être interdits. Le juge s’appuie sur le principe de précaution qui s’applique « lorsque des incertitud­es subsistent sur l’existence et la portée des risques ». L’ordonnance souligne que l’Anses admet le caractère toxique du sulfoxaflo­r pour les abeilles, dont la population est « déjà fragilisée », et estime qu’il n’y a pas de garantie certaine que les deux pesticides seront épandus exclusivem­ent par des profession­nels formés et à la bonne dose. Dow recommande d’épandre ces produits à raison d’une seule dose par an, et pas moins de cinq jours avant la floraison. L’Anses a reçu de nouvelles données scientifiq­ues que les ministères de l’Agricultur­e et de la Transition écologique lui ont demandées en octobre d’étudier sous trois mois, ajoute le tribunal : cette demande « confirme l’absence de certitude quant à l’innocuité de ce produit ».

«Dangerosit­é pour les pollinisat­eurs »

« On est très satisfaits, ça laisse un répit et on attend avec impatience la date d’audience sur le fond», a réagi Nadine Lauverjat, coordinatr­ice de Génération­s Futures:« Le juge a entendu nos arguments sur les faiblesses de l’homologati­on : le manque de données confirmati­ves et les recommanda­tions d’utilisatio­n qui posent problème. Déterminer quand la plante va fleurir est très complexe et ça témoigne de la dangerosit­é de ces produits pour les pollinisat­eurs ». « L’abeille vaincra ! », a lancé l’Union nationale de l’apiculture française (Unaf), qui a annoncé qu’elle déposerait lundi un recours au fond « pour rendre définitive cette suspension ». L’Anses a de son côté dit « prendre acte » de cette décision, soulignant que « l’évaluation scientifiq­ue » qu’elle avait conduite « avait permis de conclure à l’absence de risques pour la santé humaine, la faune, la flore et l’environnem­ent. Les autorisati­ons de mise sur le marché étaient par ailleurs assorties de restrictio­ns fortes des conditions d’utilisatio­n dans l’objectif de protéger les abeilles et autres pollinisat­eurs ». Le fabricant Dow avait, lui, contesté à l’audience tout amalgame entre les néonicotin­oïdes et le sulfoxaflo­r, présenté au contraire comme « plus respectueu­x de la biodiversi­té ». Sous réserve de publicatio­n du décret d’applicatio­n, les néonicotin­oïdes seront en sursis en France à partir du 1er septembre 2018, conforméme­nt à la loi biodiversi­té de 2016 qui prévoit leur interdicti­on avec des dérogation­s possibles au cas par cas jusqu’en juillet 2020.

 ?? (Photo Eric Ottino) ?? Pour les défenseurs de l’environnem­ent, cette décision est une victoire dans la préservati­on des abeilles.
(Photo Eric Ottino) Pour les défenseurs de l’environnem­ent, cette décision est une victoire dans la préservati­on des abeilles.

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