Le maire réclame millions
AUX OPPOSANTS DU CASINO DE SANARY
Le chantier de l’établissement de jeux a débuté, mais Ferdinand Bernhard entend faire payer le manque à gagner aux auteurs des recours contre le projet.
Des affaires comme celle-ci, le tribunal d’instance (TGI) de Toulon ne doit pas en voir souvent. Quoi qu’il pouvait s’y attendre car, depuis plusieurs mois, le maire de Sanary prévenait : « Désormais, j’attaquerai tous ceux qui s’opposent aux projets municipaux. » C’est ce qu’il fait. Et pas dans la demi-mesure ! L’un des avocats de la ville, Me Faure-Bonaccorsi, vient d’assigner devant le TGI l’Association pour la protection du patrimoine Michel Pacha, ainsi que ses membres Sophie Marty et Maurice Desmazures. Ce dernier en est le président, mais c’est également le propriétaire du château de Pierredon. Il s’agit de cette imposante bâtisse qui surplombe l’ancien chemin de Toulon, récemment inscrite au titre des monuments historiques et au nom de laquelle l’association a tenté, ces dernières années, d’empêcher la construction d’un casino, en contrebas, sur le terrain du Colombet.
Le montant du manque à gagner
Y est-elle parvenue? Non, puisque, il y a quelques mois, le chantier a débuté,
et l’ouverture de l’établissement de jeux (du groupe Vikings) au public est même annoncée pour 1er novembre 2018. En revanche, depuis le premier recours, déposé en 2011, elle a sacrément retardé le projet. Et c’est bien du fait de ces années de procédures (lire par ailleurs) que la ville s’estime aujourd’hui en droit de
leur réclamer… 9 millions d’euros de préjudice ! Soit le montant estimé du manque à gagner pour la commune. Cela correspond à ce qu’auraient dû rapporter « les prélèvements sur les recettes du casino, la contribution touristique, la contribution artistique ou encore la redevance pour la mise à disposition du terrain, fixée à
1,3 million d’euros», peuton lire dans l’assignation. Et Ferdinand Bernhard n’oublie pas de faire remarquer que « sans tous ces recours, le casino et l’hôtel (inclus dans la délégation de service public, qui doit être construit prochainement, Ndlr) auraient déjà fourni du travail à une centaine d’habitants. Quel mépris ! ».
« Interdit de contester le maire »
De son côté, Maurice Desmazures voit dans cette action en justice intentée par la ville « une absurde tentative d’intimidation». «A Sanary, on n’aurait donc pas le droit de contester une décision du maire ? Dans l’assignation, on nous reproche d’avoir fait ça uniquement par inimitié envers le maire ! Or, l’Association Michel Pacha oeuvre pour la défense du patrimoine et c’est dans ce cadre qu’elle a demandé l’annulation du permis de construire. Dans ce cas, pourquoi ne pas attaquer aussi Partouche (ce groupe de casinotiers concurrent qui avait aussi tenté, en vain, de faire annuler le projet, Ndlr) ?» Que M. Desmazures se rassure, c’est aussi prévu ! «Un autre avocat est en train de constituer le dossier » , annonce calmement le maire… Quant aux divergences personnelles perçues par l’opposant comme l’élément déclencheur à cette demande de dédommagements exorbitante, il ne croît pas si bien dire : c’est exactement là-dessus qu’est fondée la plaidoirie de la ville (lire par ailleurs). L’audience devrait se tenir d’ici 12 à 18 mois. Suspense.