Vers une Corse plus unie et plus puissante
Le scrutin corse du et décembre est déterminant : il s’agit d’élire, au second tour, la semaine prochaine, élus d’une nouvelle instance unique qui dirigeront la région pour quatre ans dès le
er janvier prochain. Finie la division de la Corse en deux départements, fusion au contraire des deux conseils départementaux et de la collectivité territoriale, voici que se met en place une collectivité plus grande, plus unie, donc plus puissante. Même si la participation au premier tour d’hier a été faible – les conditions climatiques y sont certainement pour beaucoup – les nationalistes ne s’en sont pas moins affirmés comme les vainqueurs de ce scrutin inédit. Rien d’étonnant à cela : d’abord, parce que ce sont toujours les militants, donc les plus convaincus, qui, sous la neige, la pluie ou le verglas trouvent le chemin des urnes, là où les moins déterminés des électeurs hésitent à se frayer un chemin difficile vers les bureaux de vote. Et puis surtout, parce que, depuis la conquête par Gilles Simeoni de Bastia en , son courant ne cesse de progresser : victoire nationaliste aux régionales de , entrée de trois députés nationalistes à l’Assemblée nationale aux dernières élections législatives de , montée continue de ce même mouvement à l’Assemblée de Corse qui a vu les nationalistes passer de en à lors du dernier scrutin. En Corse, hier, le « dégagisme » ambiant n’a pas profité au mouvement En marche !, et il a de surplus marginalisé la gauche et la droite qui se sont partagé l’île pendant des années, tandis que le Front national a pratiquement disparu. Il a largement profité, en revanche, aux autonomistes d’autant que l’accord de mandature conclu entre le parti de Gilles Simeoni et celui de Jean-Guy Talamoni a éloigné le spectre, redouté par certains, de l’indépendantisme. Et maintenant ? Il est peu probable qu’une grande coalition de la gauche, de la droite et du mouvement En marche ! soit capable d’inverser la tendance du premier tour. En revanche, on voit bien comment un tel résultat peut encourager les revendications autonomistes. Gilles Simeoni ne s’en est pas caché : « Une autonomie de plein droit pour la Corse », a-t-il réclamé dans une interview. Une autonomie accrue, certes, mais le mot d’indépendance n’est pas prononcé. Car les Corses savent bien ce qui les différencie de la Catalogne pour ne citer qu’elle. Habitants d’une région riche, contribuant fortement au PNB de l’Espagne, les Catalans peuvent être tentés, en effet, de se dire qu’ils n’ont aucun besoin de Madrid pour vivre. Différent est le cas de la Corse, où les dotations du pouvoir central restent indispensables. La Corse a donc besoin de la France, et sans doute est-ce l’habileté d’un homme comme Simeoni de l’avoir compris, au lieu d’enfourcher la cause d’un indépendantisme risquant d’amener l’île à plus de pauvreté. À l’État maintenant de négocier avec ceux qui seront probablement les vainqueurs du second tour, un accord qui donne à la nouvelle instance corse plus de pouvoirs tout en préservant l’insertion de la Corse dans le territoire national.
« La Corse a donc besoin de la France, et sans doute est-ce l’habileté d’un homme comme Simeoni de l’avoir compris. »