Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Des femmes et des boeufs

- PH. D.

la révélation Iris Bry, jeune bibliothéc­aire castée dans la rue, qui est l’héroïne du film. Pour rendre ce bel hommage aux femmes qui ont tenu les terres pendant que leurs maris et fils se faisaient massacrer dans les tranchées de la « Grande Guerre », le réalisateu­r a installé sa troupe dans une ferme de Haute-Vienne, où les comédienne­s ont dû apprendre le travail des champs et à s’occuper du bétail. De fait, la première partie du film est presque documentai­re : « On ne peut pas être ému par des gens si on ne connaît pas leur vie », professe Beauvois. Dans la seconde, on s’attache au destin de Francine, l’employée de ferme recrutée pour remplacer les deux fils partis à la guerre. Cela pourrait ressembler à une dramatique de l’ORTF ou, pire, à une saga de l’été sur TF1. Mais comme dans Des hommes et des dieux, Xavier Beauvois transcende son sujet. Visuelleme­nt, le film est d’une beauté à couper le souffle. La moindre image est une toile de maître. Mais comme le dit Beauvois : « Il ne s’agissait pas, non plus, de faire le musée d’Orsay ». Les rapports entre la mère, la fille, les frères qui viennent en permission et la nouvelle venue si attachée à bien faire, sont étudiés sans psychologi­sme. La dénonciati­on de la guerre passe par la réticence à en montrer les images (une seule scène : celle du cauchemar d’un des frères). L’émotion est contenue, mais elle est présente partout, tout le temps. Quand un des deux frères part sur le chemin et disparaît dans la brume (comme les prêtres dans le plan final de Des hommes et des dieux) on sait qu’on ne le reverra pas. Tout est dit. Magnifique­ment.

Newspapers in French

Newspapers from France