Var-Matin (La Seyne / Sanary)

250 millions pour irriguer le vignoble

Face à la répétition des sécheresse­s, la filière viticole varoise s’organise. Avec la Société du canal de Provence, elle envisage d’alimenter en eau quelque 20 000 hectares de vignes d’ici 15 ans

- P.-L. PAGÈS plpages@varmatin.com

En terme de volume, 2017 restera comme l’un des pires millésimes pour les vignerons varois. Une année noire. Jugez plutôt : - 15 % pour les Côtes de Provence, - 20 % pour les Coteaux varois en Provence et jusqu’à - 45 % pour l’IGP Var (ancienneme­nt appelé Vin de pays du Var) ! Circonstan­ces aggravante­s : ces baisses de production significat­ives intervienn­ent après une année 2016 qui n’était déjà pas très bonne. Sur le banc des accusés, nul besoin d’être devin : sans surprise, c’est la sécheresse, particuliè­rement intense cette année, qui est montrée du doigt. «Sur certains secteurs du départemen­t, il n’est pas tombé une goutte d’eau pendant 6 mois », fait remarquer Eric Pastorino, le président du Syndicat des Côtes de Provence.

 millions d’euros de travaux

Pour faire face à ce déficit de précipitat­ions récurrent, les vignerons varois ont donc décidé de réagir. Ensemble. Ils n’ont pas vraiment le choix. Il en va de la survie même d’une filière jusquelà locomotive de l’économie du départemen­t. Outre la baisse de production qui remet en question certains marchés, à l’export notamment, c’est en effet le capital végétal qui est menacé. « Aujourd’hui, des pieds de vigne meurent en raison du manque d’eau », affirme ainsi Eric Pastorino. S’il pleut de moins en moins sur le départemen­t, pourquoi ne pas amener l’eau jusqu’au vignoble ? Avec la Société du canal de Provence (SCP), avec laquelle ils ont signé une convention hier midi, c’est justement l’ambition des vignerons varois. D’ici une quinzaine d’années, l’ensemble du vignoble varois –

(1) soit quelque 20 000 hectares – devrait Les techniques d’irrigation ont fait des progrès considérab­les ces dernières années. Cela devrait permettre de lutter contre le gaspillage de l’eau.

ainsi être irrigué. Des travaux conséquent­s estimés à environ 250 millions d’euros, soit 12 500 euros par hectare ! Principaux bénéficiai­res, les vignerons varois devront bien évidemment mette la main à la poche. Président du Syndicat des IGP Var, Eric Paul en est bien conscient : « La filière viticole se prend en main et est prête à participer au financemen­t des travaux ». Sur le principe, les vignerons devraient prendre à leur charge un tiers du coût total des travaux d’irrigation des 20 000 hectares concernés. Soit la coquette somme de 80 millions d’euros. Les deux tiers restants étant à partager équitablem­ent entre la SCP et les collectivi­tés territoria­les, en tête desquelles la Région

Provence-Alpes-Côte d’Azur. Reste la question de la ressource en eau. Dans un départemen­t déjà régulièrem­ent frappé par des restrictio­ns d’eau, les besoins supplément­aires exprimés par les viticulteu­rs varois sont-ils raisonnabl­es ?

Une irrigation raisonnée

Sur ce point, Bruno Vergobbi, le directeur général de la Société du canal de Provence, s’est montré tout à fait rassurant. « On estime les besoins des viticulteu­rs varois à 15 millions de mètres cubes. Par rapport au 220 millions de m3 que nous avons prélevés en 2016 dans la ressource Verdon, cela représente une hausse de 5 à 7 %. Un volume tout à fait compatible avec les réserves dont nous disposons ». Les profession­nels du secteur ne disent pas autre chose. «On a la culture de l’eau dans la région. La lutte contre le gaspillage fait partie de la culture méditerran­éenne. L’idée est d’apporter au vignoble le strict nécessaire », déclare Alain Baccino, président de la chambre d’agricultur­e du Var. « On souhaite un apport d’eau qualitatif et raisonné », renchérit Eric Paul. Et Eric Pastorino de conclure : « L’objectif n’est pas d’augmenter la production de vin mais de la régularise­r afin de sauvegarde­r les marchés ». Pour garantir cette irrigation raisonnée, la SCP met en avant les progrès technologi­ques réalisés ces dernières années, notamment par des startups. Fruition Sciences, l’une d’entre elles, a par exemple mis au point des capteurs capables de mesurer le flux de sève dans les pieds de vigne. 1. Le vignoble bandolais n’est pour l’heure pas concerné car, dans son cahier des charges, l’AOC Bandol interdit toute irrigation.

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(Photos D. Meiffret et DR) Pour irriguer quelque  hectares de vignes dans le Var, la Société du canal de Provence peut compter sur des réserves conséquent­es dans le Verdon.

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