Benoît Hamon ce soir à la Bourse du travail
L’université de Toulon ayant refusé sa venue, c’est à La Seyne-sur-Mer que le leader de Génération.s tiendra ce soir une réunion. L’ex-candidat à la présidentielle veut toujours redistribuer le travail
Benoît Hamon souhaitait intervenir à l’université de Toulon. C’est finalement à la Bourse du Travail de La Seyne-sur-Mer qu’il tiendra, ce soir à 18 h, une conférence sur « Le contrat social au XXIe siècle: être jeune en 2018». L’accès à la fac de droit de Toulon lui a, en effet, été refusé, ce dont l’ancien candidat socialiste à la présidentielle, qui a depuis fondé le mouvement Génération.s, ne s’est toujours pas remis. «C’est la première fois qu’une telle décision est prise, elle est pour moi incompréhensible, d’autant que je suis l’ancien ministre de l’Education. Il ne faut pas confondre une conférence avec un meeting. Ce refus est le signe d’une société qui régresse sur le plan démocratique… Comme si les étudiants n’avaient pas assez de libre arbitre pour se forger leur propre opinion et faire le tri, c’est hallucinant ! Pourquoi ne pas leur refuser le droit de vote, tant qu’on y est ? »
Où en êtes-vous de la structuration de votre mouvement, Génération.s ?
Générations.s, sept mois après sa création, ce sont aujourd’hui plus de membres et comités. C’est un mouvement en plein essor dont on vient de rendre public l’organigramme, qui repose sur deux piliers : une coordination politique qui a été élue le décembre et un conseil de trente personnes tirées au sort parmi les membres qui étaient candidats. Nous voulons un fonctionnement qui prenne fidèlement en compte les souhaits démocratiques de nos adhérents.
Votre ancien parti, le PS, est-il mort à vos yeux ?
Plus de % de nos membres n’ont aucune expérience au sein d’un parti politique ou d’un syndicat. Je ne regarde pas la manière dont les autres partis se vident, mais celle dont notre mouvement se remplit. Quand un parti politique ne sait plus démontrer son utilité sociale, il est normal qu’il s’éteigne.
Un an après votre victoire à la primaire de la gauche, avezvous fait évoluer vos positions sur le travail et l’écologie ?
Lorsque l’on voit que l’entreprise Amazon s’apprête à imposer un bracelet électronique à ses salariés pour mesurer leur temps d’activité, lorsque l’on voit tous les secteurs qui suppriment des emplois, les idées que j’ai pu défendre, comme la taxe sur les robots et la nécessité d’un nouveau contrat social autour du revenu universel, restent d’une très grande actualité. Je n’ai absolument pas changé d’avis, ce qui n’empêche pas de faire évoluer nos propositions. Concernant la transition écologique, tout le monde voit bien l’impact très négatif de l’activité humaine sur le climat. Les accords de Paris sont intéressants, en théorie, mais dans les faits très en deçà des décisions à prendre pour enrayer le scénario d’un réchauffement climatique irréversible. Les élections européennes seront déterminantes sur ce point. Si l’on poursuit les politiques menées par Merkel ou Macron, ou à l’inverse les politiques nationalistes, c’est-à-dire la fin du projet européen, la menace sur le climat sera renforcée. C’est la raison pour laquelle, avec d’autres mouvements européens, nous voulons incarner une troisième voie, entre l’austérité et la fin de l’Europe induite par le nationalisme.
Le revenu universel, si c’était à refaire, vous le présenteriez toujours de la même façon ?
Oui. Il y a peut-être des choses à modifier techniquement, mais la question est de savoir comment repenser la protection sociale du XXIe siècle, comment protéger nos citoyens des aléas de la vie. Alors que les élites françaises disent « Circulez, il n’y a rien à voir ! », dans le monde entier, des intellectuels, des mouvements citoyens et même des grands patrons affirment que la révolution numérique impose de penser des solidarités nouvelles. Nous devrions, comme en , réunir l’ensemble des partenaires politiques et sociaux pour repenser un nouveau modèle social français, qui intégrerait en particulier la prise en charge du vieillissement, quand on voit avec quelle indignité notre société traite aujourd’hui ses aînés.
La semaine de h, réclamée par un syndicat allemand, c’est une piste réaliste ?
Le partage du temps de travail existe dans les faits entre ceux qui s’abîment au travail et ceux qui ne travaillent pas. Je propose de concevoir la réduction du temps de travail comme un moyen de créer des emplois. L’idée n’est pas de fixer forcément la durée légale à ou heures, mais d’envisager toutes les formes à travers lesquelles la réduction du temps de travail peut créer des emplois et redonner de l’autonomie aux individus, qui puissent choisir ou non de diminuer leur durée de travail. Sans quoi, le partage du labeur se poursuivra sous la forme d’une augmentation des inégalités face au travail, avec certains travaillant jusqu’au burn out et d’autres plus du tout.
Le projet de loi dit « Asile et Immigration » vous dérange…
Emmanuel Macron fait le contraire de ce qu’il avait annoncé. En France, il y avait trois endroits où on ne vous demandait pas vos papiers : à l’école, à l’hôpital et dans un centre d’hébergement d’urgence. Pour la première fois, ces droitslà vont être remis en cause. On ne peut pas se revendiquer des grands principes de la République et les bafouer comme le fait Emmanuel Macron.
La refonte des modalités d’accès à l’université ?
Lorsque j’étais ministre de l’Education, un consensus s’était dégagé sur la nécessité d’injecter cinq milliards en cinq ans afin de démocratiser l’enseignement supérieur et donner à chacun des chances de succès. L’Etat ne va mettre qu’un milliard et, comme il est conscient que cela ne permettra pas de faire face à l’augmentation de la démographie étudiante, il ferme la porte à certains jeunes en créant une sélection à l’entrée. Le bac ne sera plus un passeport pour l’enseignement supérieur. Cela va fermer l’université aux bacheliers techno et pro, ce sont toujours les mêmes qui feront les frais d’un élitisme forcené et inacceptable. Les élites actuelles reproduisent leur modèle idéal, celui de l’entre-soi.