Var-Matin (La Seyne / Sanary)

À peine  ans et ivres

- LAURENT AMALRIC

Écouteurs incrustés dans les oreilles, regard fixé sur l’écran de son smartphone et va-et-vient incessant avec sa cigarette, Julien (1), en classe de première, profite de la pause récré pour s’en griller une à l’extérieur de l’enceinte de son lycée. Un établissem­ent varois comme tant d’autres, avec ses grappes adolescent­es qui déboulent dès que l’on parle avec l’un d’entre eux, histoire de savoir ce que peut bien leur vouloir cet adulte avec son bic à la main…

« Drogue» de supermarch­é

Décontract­és et limite hâbleurs, ils ne jouent pas aux angelots. Et immanquabl­ement, l’étude sur les comporteme­nts des ados qui tendraient à s’assagir les fait sourire. Une moue d’ailleurs partagée par le corps enseignant et le proviseur de l’établissem­ent. « En dix ans, nous avons vraiment l’impression que le cannabis s’est banalisé. Et les fumeurs ne cessent d’augmenter », réagissent-ils. « Que les ados boivent moins oui, mais ce qui est certain, c’est qu’ils fument plus. Tout confondu. La chicha, on le fait chez soi. L’herbe et le shit, c’est devenu commun. Ça fait partie de notre quotidien. La cigarette électroniq­ue, c’est pour les darons ! Sinon, c’est à la mode de prendre des trucs chelous… », assène Quentin, en classe de terminale. Une allusion aux « drogues alternativ­es » pas forcément très difficiles à se procurer puisqu’en rayons de… supermarch­é !

« Pas une soirée sans azote et poppers »

« L’azote, c’est très courant. On achète des petites cartouches, celles qui servent pour les siphons à chantilly, et on respire le gaz. Ça a un effet euphorisan­t ! À la limite, s’il n’y a pas d’alcool à une soirée, c’est pas grave, mais s’il n’y a ni azote ni poppers, ce sera une mauvaise soirée ! », poursuit Quentin, entouré de ses amis qui opinent du chef. « On a aucune gêne là-dessus. Le poppers, tout le monde a essayé », confirme Léa, 16 ans, qui préfère même inhaler ces gaz hilarants que fumer… « Les filles sont plus excessives quand elles fument. Et quand elles prennent des trucs, c’est vraiment pour se mettre une mine », intervient Hugo, 16 ans. « Moi je sortirai jamais avec une fille qui fume en mode 24/24. On les appelle des crasseuses ! », rigole Quentin.

Tentations de synthèse

Derrière leur attitude désinvolte, ces ados sont conscients des dangers de la spirale qui peut les happer… « Ce qui me fait un peu peur c’est qu’un jour le joint et le reste ne suffisent pas. Que l’on essaie autre chose de plus puissant… Des produits de synthèse comme le K2 Purple Drank, MDMA, c’est pour un cercle très fermé, mais ça commence à arriver. La cocaïne c’est assez rare aussi », commente-t-on dans le groupe. « Avant, je pensais que la cocaïne c’était le mal incarné et puis cet été, alors que je travaillai­s en saisonnier dans un restaurant, j’ai vu mon patron en sniffer toute la journée…», raconte Julien en écarquilla­nt les yeux.

MDMA tout le monde descend…

« Nous, en général, on expériment­e, mais on ne franchit pas la ligne blanche», rassure Quentin qui s’est « arrêté » à la MDMA. « Ouais, on fait gaffe, même avec le cannabis, de ne pas se mettre dans des états qu’on ne souhaitera­it pas », renchériss­ent Hugo et Julien, alors que la sonnerie retentit. Terminé le bol d’oxygène enfumé. Retour en classe pour un shoot de matière grise. 1- Tous les prénoms de jeunes ont été modifiés. 2- Cannabis de synthèse 85 fois plus puissant que la marijuana.

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(Photo Dylan Meiffret) (Photo Dylan Meiffret) Quelle étape après le joint ?

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