Var-Matin (La Seyne / Sanary)

La bataille du rail

- DENIS JEAMBAR Journalist­e et écrivain edito@nicematin.fr

Proche d’Alain Juppé, Edouard Philippe a peut-être demandé à son ancien mentor quelques conseils pour ne pas trébucher lourdement, comme lui en décembre , sur le dossier de la SNCF. Pour avoir voulu normaliser le régime spécial de protection sociale des cheminots, le maire de Bordeaux, alors Premier ministre, dut affronter une grève qui paralysa le pays durant trois semaines et devint un boulet pour le gouverneme­nt. Ce violent épisode social a tellement marqué les esprits que, pour les pouvoirs successifs, la SNCF est devenue un sujet tabou. Résultat, l’entreprise est plombée par  milliards de dette, proche de l’asphyxie financière et toujours pas adaptée à l’ouverture des lignes TGV à la concurrenc­e en  avec un coût au kilomètre supérieur de % à celui des autres réseaux européens. Bref, c’est un fleuron français en péril que le gouverneme­nt entend, aujourd’hui, réformer en s’appuyant sur le rapport décapant que lui a remis la semaine dernière l’ancien PDG d’Air France-KLM, JeanCyril Spinetta, avec notamment la remise en cause des avantages statutaire­s des cheminots. La réaction syndicale a été immédiate : on veut casser le service public. Avec, bien entendu, en première ligne la CGT – toujours majoritair­e dans le rail bien qu’en perte de vitesse – qui en appelle à la grève le  mars. L’histoire ne repasse pas, cependant, toujours les mêmes plats. D’abord, des réformes ont permis de limiter l’impact de la grève : les arrêts de travail ne sont plus payés et les cotisation­s retraite pas versées pendant le mouvement. Ensuite, il existe depuis  un service minimum qui limite le risque de thrombose nationale. Enfin, il y alaméthode Macron. Elle consiste, comme pour les ordonnance­s sur le travail, à prendre tout le monde de vitesse, à lancer une période de consultati­on en ayant un projet déjà très avancé alors que les interlocut­eurs ne sont pas prêts. Les consultati­ons ont, d’ailleurs, débuté dès hier à Matignon et au ministère des Transports. Nul doute qu’elles soient rudes. Difficile d’éviter des grèves. Le pouvoir y est prêt et sans doute beaucoup mieux armé que ses prédécesse­urs pour les affronter. Avec une inconnue : la CGT joue là son avenir. Le rail est le dernier terrain sur lequel elle est encore assez puissante pour se battre. C’est donc un quitte ou double pour elle. Le pouvoir affronte une bête blessée.

« La CGT joue là son avenir... C’est donc un quitte ou double pour elle. »

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