Tout le monde est mécontent
Ce qu’ils pensent du plan ?
- Jacques Courron, président de la Fédération ovine des AlpesMaritimes : « On prend les mêmes et on continue. Ce plan n’est rien de plus qu’un plan loup des années 2000. Les plans loup successifs n’ont pas prouvé leur efficacité et, hélas, ils se suivent et se ressemblent. En 2017, on a comptabilisé 3 000 victimes dans les Alpes-Maritimes et 11000 au niveau national. Les choses ne changent pas, mais on continue de s’obstiner. » - Gérard Carratti, ex pilote du protocole prédateur -proie dans le parc du Mercantour (20072012), accompagnateur, guide naturaliste et spécialiste du loup : « C’est encore une fois un plan très politique, très loin de réunir les conditions réelles qui permettraient de réduire les dégâts. Au lieu d’avancer sur un plan technique, on avance sur un plan politique. Mais sur aucun point on avance courageusement ». - France Nature Environnement.
« On était en droit d’espérer que le gouvernement se démarque de ses prédécesseurs en faisant le choix de favoriser la coexistence entre élevage et prédateur, indiquent plusieurs associations dans un communiqué. Malheureusement il n’en est rien: la publication du nouveau «Plan Loup» pour la période 20182023 est une nouvelle occasion manquée pour définir de nouvelles orientations d’une gestion intégrée. »
loups en : trop ou pas ?
- Jacques Courron : « Dans la mesure où le chiffre de la population n’est pas exact, ce régime de quota n’a ni queue ni tête. Le problème n’est pas de savoir combien il faut en tuer, mais de permettre aux éleveurs de pouvoir intervenir quand il y a trop de pression sur une exploitation. Le nombre de loups augmente de 20% par an – en comptant le braconnage – et sans prendre en compte les erratiques qui ont été chassés de la meute. Quand on va arriver à 40 loups tués, que va-t-il se passer après? Rien? Ce n’est pas normal. »
- Gérard Carratti : « Ce chiffre n’a pas de sens. En plus, cela risque d’éclater certaines meutes et par conséquent d’accroître le nombre de loups dont la population augmente et augmentera chaque année. Si l’homme ne prélevait pas de loup, celui-ci s’auto-régulerait. En fait on tue des loups, mais peut-être pas les bons. Par exemple, en octobre dernier dans la Haute Tinée, deux loups dominants ont été tués et désormais ils sont 6. En plus les attaques de troupeaux n’ont pas baissé. Les seuls quotas qui seraient efficaces, 30 à 40% de prélèvement, sont ceux qui sortiraient du cadre des engagements internationaux. Il faut être dans une politique sincère de protection des troupeaux». - France Nature Environnement : « Alors que l’Etat permet la destruction de 40 loups par an depuis 4 années déjà, il n’a fait procéder à aucune évaluation de l’efficacité de ces abattages pour réduire les attaques sur les troupeaux ovins. Et pour cause : le tir indifférencié de loups est plus qu’inefficace, contre-productif (éclatement des meutes, dispersion, absence d’apprentissage de la cohabitation…). »
Ce qui manque ?
- Jacques Courron : « Une écoute des victimes et non pas seulement de quelques-uns qui adorent cette bête, mais ne l’ont jamais vue. En fait, on ne doit pas tuer un loup, mais des moutons oui. C’est du spécisme. Nous, pour un loup tué, combien de moutons morts?» - Gérard Carratti : « Beaucoup de courage politique ». - France Nature Environnement : « L’Etat montre qu’il est dans une position défensive et qu’au lieu d’assumer un objectif de coexistence, il n’a ni le courage de rappeler le cadre de la loi ni celui d’affirmer qu’il est nécessaire que l’élevage s’adapte à la présence de cette espèce protégée. C’est pourquoi les orientations du Plan d’actions national sont déséquilibrées, et les dispositions des projets d’arrêtés inacceptables. »
Leurs idées
- Jacques Courron : « Il faut mettre en place une véritable régulation, car la cohabitation est impossible. Dans tous les pays d’Europe où le loup est là, ça se passe mal. Il faut faire baisser la pression sur les troupeaux et accorder aux éleveurs le tir de défense tout le temps ». - Gérard Carratti : « Il faudrait tester une méthode qui serait mal perçue par l’opinion publique, mais qui pourrait peut-être s’avérer efficace: le prélèvement de louveteaux dans la tanière le plus tôt possible après leur naissance. Quand une meute est installée, le couple va procréer et mettre bas 5-6 louveteaux. La meute va alors réduire son territoire et perdre sa capacité de chasse sur la faune sauvage. Elle va alors choisir la facilité et se tourner vers les troupeaux. En prélevant les louveteaux, la meute va reprendre son territoire initial et réduire ses attaques de troupeaux. Cette théorie demande des moyens importants à mettre en place, mais elle serait peut-être plus efficace que tuer des loups adultes au risque de déstabiliser la meute. » - France Nature Environnement : « Le loup ne saurait être le bouc émissaire d’une filière en crise et si son retour pose des questions concrètes, des solutions existent: un renforcement des moyens de protection; des expérimentations sur l’adaptation de la conduite des troupeaux en présence du loup pour réduire leur vulnérabilité; le développement de recherches opérationnelles destinées à mieux prévenir les attaques. Nos associations sont solidaires des éleveurs qui subissent des attaques malgré les mesures préventives mises en place. Conformément au statut du loup, espèce protégée au niveau international, les tirs doivent être réservés à des situations dérogatoires, aux fins de protection des élevages. »