Les vandales
Good bye Gobee... Après seulement quatre mois, la société hongkongaise de location de vélos en libre-service s’en va de France. Les casseurs ont gagné. « Depuis la mi-décembre, c’est un effet domino de dégradations qui s’est abattu sur notre flotte », explique un communiqué de l’entreprise, précisant que mille de ses vélos ont été volés ou « privatisés » et près de 3 4000 « endommagés ». Elle avait déjà annoncé son retrait de Belgique et d’Italie. Ce qui prouve – maigre consolation – que nous n’avons pas le monopole du vandalisme… Le P.-D.G. de Gobee, un Français de 28 ans installé à Hongkong, d’où il a assisté à l’essor de ce modèle en Asie (2,5 millions de vélos partagés rien qu’à Pékin), ne s’attendait pas à un tel fiasco. Nous non plus. Sur le papier, le système dit de free floating a bien des atouts : plus de bornes, plus de stations (vous savez, celles où il n’y a plus de vélo disponible, ou alors pas de place pour se garer). Les vélos, disséminés en ville, sont géolocalisables via une appli pour smartphone. Il suffit de déverrouiller l’antivol en scannant un code-barres et roule. A l’arrivée, on laisse l’engin sur place. Simple et commode. Pas étonnant que le marché explose (notamment en Asie et en Amérique du Nord), et qu’il suscite des convoitises. A Paris, vu le désastre qu’a été le lancement du nouveau Vélib, les Gobee, Ofo, Obike et cie se frottaient déjà les mains. Ils ont vite déchanté. Nous n’entrerons pas ici dans le débat de spécialistes entre partisans du vélo en station et du vélo sans station. Ce qui nous interroge et nous trouble, et nous fait même un peu honte, c’est ce que l’affaire nous dit de notre pays : un tel degré d’incivisme, d’égoïsme et de malhonnêteté n’est pas seulement choquant. Il est incompréhensible. Vu de Berlin, de Tokyo ou de Stockholm, il donne de la France une image détestable. Pourquoi les vélos sont-ils systématiquement volés ou vandalisés (les Vélib aussi, d’ailleurs) ? De doctes sociologues se sont penchés sur la question, sans vraiment conclure. Nous hasarderons une hypothèse : dans une société nourrie de défiance et de détestation des élites, il est des actions stupides et immorales qui se donnent pour des actes de défi ou de rébellion. Et cela n’excuse rien du tout.
« Pourquoi les vélos [en libre-service] sont-ils systématiquement volés ou vandalisés ? »