Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Des “historique­s” aux “Baumettes ”: un bouleverse­ment séculaire

-

Une immense porte métallique verte. Rouillée, taguée. Et bientôt définitive­ment fermée. C’est par l’ancienne entrée que Guillaume Piney, le chef d’établissem­ent, a choisi de faire pénétrer la députée du Var Emilie Guérel dans l’enceinte du centre pénitentia­ire de Marseille. C’est l’entrée des « Baumettes historique­s », tristement célèbres dans tout le pays pour leur vétusté et leur insalubrit­é. La constructi­on remonte aux années trente, mais c’est carrément en plein XIXe siècle que l’on semble propulsé.

« C’est le bruit habituel »

D’abord un silence étonnant. Les bâtiments administra­tifs sont désaffecté­s depuis l’ouverture de la nouvelle prison voisine, « Baumettes 2 », en mai 2017. Puis un escalier sordide pour rejoindre la zone de détention. Et le vacarme. Des cris, des coups contre les vieilles portes en bois qui résonnent tout le long du couloir. «C’est le bruit habituel, pas le signe d’une agitation particuliè­re» , assure pourtant le directeur. S’y ajoutent les bruits métallique­s des trousseaux de clés, des portes qui s’ouvrent et se ferment. C’est l’heure de la promenade, celle où les surveillan­ts des différents niveaux se regroupent. Le reste du temps, on compte « un surveillan­t face à une centaine de détenus pendant six heures ». La députée demande à visiter une cellule. La première qui s’ouvre est étonnammen­t entretenue. La suivante alors ? Nous sommes bien aux Baumettes historique­s : des murs et un sol décrépis, crasseux et noircis d’inscriptio­ns, du mobilier rouillé, une odeur d’humidité... Pas de douche. Elle est collective. Emilie Guérel scrute en silence les recoins de cette cellule de 9 m2, où “vivent” deux détenus. C’est volontaire­ment que M. Piney a débuté la visite par la face sombre et “historique” des Baumettes, qui sera bientôt entre les mains des démolisseu­rs. Le contraste en sera d’autant plus saisissant. Après un passage sous terre – un étrange tunnel bétonné – on surgit en effet deux minutes plus tard en plein XXIe siècle ! De vastes bureaux neufs et silencieux. Dans l’un deux, le chef d’établissem­ent présente le plan des « Baumettes2»: « Que voulez-vous voir ? » - « Bah, tout ! répond la députée. Et aussi parler à des détenus. » C’est parti pour plus de trois heures de visite : les bâtiments réservés aux hommes, aux femmes, aux femmes mineures (13 à 18 ans), aux femmes avec enfants (moins de 18 mois); les cours de promenade, la zone psychiatri­que et somatique (où 150 à 200 consultati­ons ont lieu chaque jour), les parloirs, les unités de vie familiale, les salles de classe et de sport, la bibliothèq­ue, le quartier d’isolement et disciplina­ire…

« Toujours un collègue visible »

On est toujours en prison, mais les conditions de détention tranchent radicaleme­nt avec celles des “Baumettes historique­s” (BH). Tant pour les détenus que pour le personnel. « C’est ouvert sur deux niveaux seulement, il y a donc moins de bruit, explique un surveillan­t. Et cela nous permet d’avoir toujours un collègue visible (il y a un surveillan­t par niveau, ndlr). On se sent également davantage en sécurité : les allées larges nous permettent de passer à côté du chariot si nécessaire – ce qui n’est pas possible aux BH –, les portes des cellules s’ouvrent sur l’intérieur… » Les deux détenus rencontrés par Emilie Guérel dans leur cellule – de seulement 8,40 m2 mais équipée d’une douche – confirment : ils ont connu les BH, « rien à voir ! » Bien sûr, il y a des petits soucis de promiscuit­é ou de télécomman­de… Si peu au regard du passé. « Nous n’avons pas vocation à proposer du confort, rappelle Guillaume Piney. Mais aujourd’hui, même avec une surchauffe à plus 180 %, les installati­ons permettent d’accueillir dignement les prévenus. »

 ??  ?? Changement de décor: ci-dessus, une cellule de la prison neuve, où Emilie Guérel, accompagné­e de son attachée parlementa­ire Anne-Claire Marty (à gauche), a pu s’entretenir avec deux détenus; ci-dessous, une cellule des “Baumettes historique­s”. A gauche...
Changement de décor: ci-dessus, une cellule de la prison neuve, où Emilie Guérel, accompagné­e de son attachée parlementa­ire Anne-Claire Marty (à gauche), a pu s’entretenir avec deux détenus; ci-dessous, une cellule des “Baumettes historique­s”. A gauche...

Newspapers in French

Newspapers from France