Rassembler, et après?
Et si, en se donnant pour premier secrétaire le sévère et consensuel Olivier Faure, désormais seul en lice, les militants socialistes avaient choisi de ne pas choisir. De ne pas trancher les désaccords qui ont plombé les années Hollande. Dans la confrontation télévisée des quatre candidats, exercice qui n’invite pas à la nuance, c’est peu dire que le président du groupe Nouvelle Gauche ne fut pas le plus percutant. Il est même apparu assez emprunté. A-t-on assez raillé le goût de Hollande pour les synthèses en trompe-l’oeil. Ce fut sa marque. Son habileté, un temps. Sa tragédie, finalement. C’est pourtant sur une thématique assez proche que Faure s’est imposé, fort de l’image de rassembleur qu’il a acquise en jouant les Casques bleus, sous Hollande déjà, entre frondeurs et légitimistes. «Rassembler» est son mot fétiche. Son talisman. De la «diversité» du parti, il veut faire un « atout ». Et ce langage touche au coeur des militants, au sortir d’une annus horribilis qui laisse le PS exsangue, sans leader, sans projet, sans alliés. Mais rassemblement sur quelle base ? La diversité n’est pas une ligne politique. Suffit-il de « faire dialoguer des forces différentes», comme le dit Faure, pour construire un projet politique, quand ces forces, justement, sont si différentes ? La campagne pour le poste de premier secrétaire a montré que les positions des uns et les autres sont toujours aussi éloignées. Et que la question centrale – celle du rapport de la social-démocratie à l’Europe et au libéralisme – reste posée. Il est même fascinant de constater que le PS post-Hollande, pillé par Macron et Mélenchon, abandonné par Hamon et les siens, ce Parti socialiste quasi résiduel, n’a pas gagné en cohérence et continue à reproduire, en petit, les mêmes clivages et les mêmes contradictions qui ont conduit au désastre de mai-juin . La victoire d’Olivier Faure n’a pas levé ces ambiguïtés. Bientôt ans et déjà ans de maison, il a été jeune rocardien, collaborateur de Martine Aubry, de Hollande et d’Ayrault. Parmi ses soutiens, on trouvait des représentants d’à peu près toutes les familles, et même des proches de Montebourg. Une sorte de PS en modèle réduit à lui tout seul. Cela dit une fidélité, et une compatibilité. Mais pour mener à bien la «renaissance» promise, être un dénominateur commun ne suffira pas. Si le PS veut espérer redevenir un pôle du système politique, et pas une simple force d’appoint, il ne doit pas seulement organiser son pluralisme, mais retrouver ce qu’il a perdu : une ligne stratégique.