Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Symbole de

En 1780, le marquis de La Fayette embarque sur L’Hermione pour venir en aide aux insurgés du général Washington. Deux siècles plus tard, sa reconstruc­tion perpétue l’alliance Michel Vergé-Franceschi, professeur d’histoire moderne à l’université de Tours,

- SIMON FONTVIEILL­E sfontvieil­le@nicematin.fr

JOUR

Pour que vive la liberté, il faudra toujours que des hommes se lèvent et secouent l’indifféren­ce ou la résignatio­n. » L’histoire ne dit pas si Gilbert du Motier, plus connu sous le nom de marquis de La Fayette, a prononcé cette sentence sur le pont du navire qui le mena combattre aux Amériques. Mais avouez qu’il est plaisant de penser que oui. En tout cas, cela n’aurait rien d’incongru. Car le 21 mars 1780, voilà le gentilhomm­e sur la frégate L’Hermione. Il cingle vers Boston, qu’il atteindra le 28 avril. Après avoir croisé le fer avec les Anglais dans le Nouveau monde, en 1779, le jeune aristocrat­e a en effet convaincu Louis XVI d’apporter le soutien officiel du royaume de France aux insurgés du général George Washington. Commencée en 1775, la guerre d’indépendan­ce américaine prend un tournant décisif…

Boulets et Congrès

Et L’Hermione y prendra toute sa part. Construite entre 1778 et 1779 en un temps record dans l’arsenal de Rochefort, la frégate et ses trente-quatre canons de douze et six livres ne peuvent certes pas rivaliser avec les imposants vaisseaux de ligne, mais elle a quelques atouts dans sa coque. Commandée par Louis-René-Madeleine de Latouche-Tréville – futur vice-amiral de la Flotte sous le règne d’un certain Napoléon Ier –, le navire est rapidement mis à la dispositio­n des Américains, et surveille les mouvements anglais au nord des treize colonies. Le 7 juin 1780, c’est le baptême du feu : L’Hermione croise l’Iris ,une frégate anglaise de trentedeux canons, à l’est de Long Island. En une heure et demie, les Français tirent 260 boulets. Les Anglais préfèrent prendre la poudre d’escampette, mais font au passage 10 morts et 37 blessés. LatoucheTr­éville a le bras en sang. Mais le jeune lieutenant de vaisseau n’en a cure. Le 16 mars 1781, voilà L’Hermione participan­t à une bataille dans la baie de Chesapeake. Le 21 juillet, c’est au large de Louisbourg, au Canada, que la frégate fait tonner à 509 reprises ses canons. Mais son heure de gloire avait déjà sonné le 4 mai 1781, lorsque l’équipage ayant convoyé le «héros des deux mondes » avait accueilli à son bord le Congrès américain. Quelques mois plus tard, la mission spéciale de L’Hermione prend fin. Le 25 février 1782, elle est de retour à Rochefort. Elle se consacre alors à escorter des navires marchands et à chasser des corsaires anglais dans l’océan Indien. Mais ce n’est pas au combat que périra la valeureuse frégate. En 1793, tandis que la France est en pleine convulsion révolution­naire et que se noue le drame vendéen, le navire s’échoue sur des hauts-fonds, près de l’estuaire de la Loire. Dix ans auparavant, en 1783, le traité de Paris avait cependant reconnu l’indépendan­ce des ÉtatsUnis d’Amérique, à laquelle L’Hermione avait grandement contribué. En 1917, aux cris de « La Fayette nous voilà ! », les Américains s’en souviendro­nt…

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(Photo DR) (Photo DR) Le nom de L’Hermione vient de celui, dans la mythologie grecque, de la fille du roi Ménélas et de la reine Hélène. Cette dernière étant la fille de l’Océan, Hermione en est... la petite-fille !

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