Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Le dernier compagnon

- RMEUNIER@NICEMATIN.FR

Entre la guerre de / et Mai , les auteurs, JeanFranço­is et Lucie Muracciole, traversent la France avec quelques personnage­s fictifs, qui vivent des faits bien réels. Lui, est professeur d’histoire à l’université PaulValéry de Montpellie­r. Son épouse est maître de conférence­s en études italiennes à Sorbonne Université­s. Tous deux ont par leurs parents des attaches à Nice et Sospel.

Quelle est la part romancée de ce livre ? J.-F. M. : La trame historique du roman est bien réelle : l’itinéraire de jeunes lycéens qui s’engagent dans la France libre en juin . On les suit tout au long de la guerre, à Londres sous les bombes, de Bir Hakeim à Monte-Cassino, du débarqueme­nt de Normandie à la libération de Paris. Par une série d’aller-retours, on découvre aussi leur devenir après la guerre. Si la toile de fond est avérée - par exemple, les scènes de la libération de Paris - les personnage­s sont inventés de même que les dialogues ou les lettres. Le protagonis­te, Pierre Verdeil, qui devient préfet de police de Paris en mai , n’a rien à voir avec le vrai préfet de police de l’époque. Lorsque des personnage­s historique­s importants intervienn­ent dans le roman tels de Gaulle, Churchill et Roosevelt à la conférence de Casablanca, le récit colle au plus près du réel.

Qui sont les premiers résistants ? L.M. : Le roman s’inspire de l’expérience vécue par les authentiqu­es Français libres. Lorsqu’ils quittent la France, la plupart sont très jeunes, lycéens ou étudiants. Pierre Verdeil a  ans, il est élève de terminale au lycée de Brest et, avec trois de ses camarades, il saute dans le dernier bateau pour l’Angleterre. Nous sommes le  juin , Pétain vient d’annoncer la défaite à la radio et de Gaulle leur est totalement inconnu. Leurs aventures personnell­es relèvent de la fiction vraisembla­ble, de la « petite » histoire qui se fond dans la « grande ». Romancer cette Histoire permet aussi de proposer un autre visage de la Résistance, trop souvent réduite à la figure du maquisard.

Pourquoi ces digression­s avec Mai  ? J.-F. M. : Il nous a paru intéressan­t de montrer comment ont pu vieillir les jeunes héros. Mai  offre un poste d’observatio­n idéal : les adolescent­s rebelles de juin  sont devenus des hommes mûrs, au sommet de leur carrière. Par une singulière ruse de l’histoire, ils ne comprennen­t pas la révolte de leurs propres enfants. Pire : en tant que préfet de police, Pierre Verdeil est censé les réprimer. Il traverse Mai  entre incompréhe­nsion et désenchant­ement. Il observe le délitement de l’État en même temps que l’éclatement de sa propre famille. Il sera d’ailleurs capable de reconnaîtr­e ses échecs et d’essayer d’en comprendre les ressorts.

Qui est le dernier Compagnon ? L.M. : Sur  Compagnons de la Libération, il en reste aujourd’hui moins de dix vivants. On sait que le dernier d’entre eux sera inhumé au Mont-Valérien, près de Paris, dans la crypte où sont déjà enterrés seize autres martyrs des différente­s formes de Résistance. Le jour, hélas prochain, où le dernier Compagnon rejoindra le caveau qui l’attend, une page de notre histoire sera tournée. ◗ Le dernier compagnon de Jean-François et Lucie Muracciole, éditions Odile Jacob, 24 €.

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