Quel avenir pour la salle Apollinaire ?
En vente, l’ex-cinéma fait désormais l’objet d’un combat judiciaire entre son propriétaire, un avocat, et la Ville de ancien locataire des lieux. Maître Britsch-Siri lui réclame près de 200 000
Qu’elle semble loin l’époque où l’avenue Gambetta était noire d’une foule se pressant pour voir le dernier Fernandel au cinéma l’ABC. C’était la fin des années cinquante, un temps où quatre salles obscures se faisaient concurrence
(1) à La Seyne, dont l’une de 700 places était effectivement située à deux pas de la Bourse du travail. Aujourd’hui, de cette période bénie pour le septième art de ce côté-ci de la rade, ne reste guère que le triste « squelette » de la salle Apollinaire. Un équipement devenu municipal sur le tard, servant ensuite de théâtre, de salle de concerts ou de réunion, qui avait remplacé l’ABC en même temps que la télé s’était mise à trop concurrencer le ciné. Cette friche culturelle n’attire plus désormais que l’appétit réduit d’éventuels acheteurs.
« Les acheteurs ne se bousculent pas »
Car Maître Félix BritschSiri, propriétaire du bâtiment édifié en 1957 par ses parents, entend désormais se séparer des lieux. « La salle est en vente aux alentours de 350000 euros, nous confirme-t-il. J’ai eu plusieurs visites. Des distributeurs alimentaires, et même quelqu’un intéressé pour y refaire une salle de conférence et un ciné… » Mais ça ne se bousculerait pas non plus au portillon. La parcelle de 450 m2 présenterait notamment l’inconvénient d’une présence d’eau à 3 m sous le sol, ce qui compliquerait la construction d’un éventuel parking souterrain. D’après l’avocat toulonnais, le bien aurait un autre handicap. Un contentieux sur l’état général des lieux l’oppose en effet à la Ville, locataire pendant 38 ans avant de rendre les clés en 2015 à cause d’une brusque augmentation de loyer. Le tribunal de grande instance de Marseille a ainsi été saisi par Me Félix Britsch-Siri, qui réclame à la municipalité une somme pour le moins rondelette, comprise « entre 150 000 et 200 000 euros ». Et l’ancien bailleur d’expliquer : « Je ne demande pas à ce qu’on me reconstruise un cinéma. Mais quand la Ville est partie, j’ai découvert des trous partout, des peintures intérieures et extérieures à refaire, un éclairage hors service… J’ai alors diligenté une expertise officielle et engagé une procédure pour demander au tribunal de condamner la municipalité à réaliser des travaux de remise en état. Ça aiderait à sa mise en vente. Tout le monde serait gagnant si quelqu’un venait à nouveau investir l’endroit. » Du côté de la mairie, Claude Astore, l’élu en charge du dossier, nie en bloc ces accusations. Il explique avoir « arasé à la demande du propriétaire» (voir ci-dessous). Anecdote cocasse : lors d’un conseil municipal en 2014, alors que la Ville s’apprêtait à quitter la salle Apollinaire et que l’opposition s’inquiétait de la remise en état des lieux, l’adjoint au maire s’était montré formel : « Il n’y a absolument aucun risque de contentieux avec le propriétaire »… D’après l’avocat toulonnais, le jugement ne devrait pas intervenir avant fin 2018-début 2019. Mais pour le bâtiment dessiné par l’architecte Pierre Pascalet, un happy end reste encore à écrire.
1. Le Rex, quai Gabriel-Péri, l’Odéon, avenue Garibaldi, l’ABC donc et, l’été, le casino des Sablettes.