Var-Matin (La Seyne / Sanary)

WORLD CUP SERIES, À HYÈRES L’esprit tourné vers le large

Venu à Hyères pour faire la passe de dix en « 2.4 Mètres », le double champion paralympiq­ue Damien Seguin a déjà les yeux tournés vers le Vendée Globe 2020

- ALEXANDRE REYNAUD

Le visage encore enduit de crème solaire, le sourire aux lèvres, Damien Seguin a la banane. Sa peau est encore toute rouge, stigmate des heures passées en régate. Le sentiment du travail accompli habite le Guadeloupé­en à la fin de ces six jours de course. Neuf courses pour huit succès. Le leader de la catégorie des « 2.4 » maîtrise son sujet mieux que personne. Son plus mauvais résultat au cours de cette semaine olympique ? Une place de 2e sur la 3e régate. Quarante petits centimètre­s l’ont empêché de faire le grand chelem. C’est dire… La semaine a été à sens unique. Il y a eu Damien Seguin et puis les autres. En début de semaine, le navigateur ne cachait pas ses ambitions. « Ici, j’ai le record de victoires. On va essayer de l’augmenter un peu plus. Cela montre bien que j’apprécie ce plan d’eau et qu’à chaque fois que je viens à Hyères, ce n’est pas pour prendre le soleil. Je veux gagner et me surpasser. »

Cochon et Solitaire

Hier, le natif de Briançon avait, comme à son habitude, le sourire aux lèvres, et une nouvelle médaille dorée autour du cou. « En plus de la gagner, j’ai mis la manière, glisse-til après l’ultime course. Le résultat est trompeur car ça n’a pas été si facile que ça. Rien n’est jamais gagné d’avance sur ce plan d’eau. Il faut être à fond du début à la fin. » À Hyères, le Français est un habitué des podiums. Et pour cause, il est tombé sous le charme du plan d’eau et des Îles d’or : « Pour moi, c’est un événement à ne pas rater. On a la chance de courir dans une baie qui est magnifique avec les îles autour. Ce n’est pas souvent qu’on navigue dans des conditions comme ça. On vient le plus tôt possible pour se préparer. On invite aussi des étrangers pour faire des stages. C’est devenu plus qu’une manche de coupe du monde. En plus, il y a du soleil, et pour le Guadeloupé­en exilé en Bretagne que je suis, c’est génial ! J’ai noué des amitiés avec des bénévoles. Je ne raterais pour rien au monde cette épreuve. » Pour Thierry Poirey, entraîneur en équipe de France, son athlète ne Le Guadeloupé­en, porte-drapeau lors des Jeux paralympiq­ues de Londres, a décroché hier une dixième victoire à Hyères.

laisse rien au hasard. Fort de son expérience sur le circuit et de son esprit de compétiteu­r, le quadruple champion du monde de la spécialité a tous les attributs d’un leader. «Damien est très pro et un peu avant-gardiste, explique-t-il. Sur l’eau, il a vraiment cette attitude de compétiteu­r. Il ne lâche rien avec son caractère de cochon. D’ailleurs, c’est sa mascotte sur son bateau. Quoi qu’il arrive, il a toujours le couteau entre les dents. Mentalemen­t, il est très bon car il sait aller au-delà des conditions difficiles. Sa double pratique est aussi une grosse qualité. » Depuis Rio et son deuxième sacre olympique acquis après celui d’Athènes, beaucoup de choses se sont passées. L’absence de la voile paralympiq­ue aux JO de Tokyo en 2020 n’a en rien atténué son désir de rester en équipe de France et d’aller chercher de nouveaux titres. À 38 ans, les idées ne manquent pas dans la tête de celui qui dessine ses propres voiles. Cette manche des World Cup Series

n’est qu’une petite parenthèse dans la vie animée du champion. La voile, sa passion, ne se résume pas seulement au monde olympique. Et comme pour tout marin, il est souvent dur de résister à l’appel du large... En 2005, Damien Seguin postule pour la Solitaire du Figaro. Mais c’est par une lettre recommandé­e que l’organisati­on le déclare inapte à cause de son handicap.

Sous l’aile de Jean Le Cam

Qu’importe. Ce sera partie remise l’année suivante, avec cette fois-ci une réponse positive. Riche d’un succès sur le Tour de France à la voile l’an dernier, le Breton d’adoption a réussi son pari : participer au Vendée Globe. « C’est super, je suis passé dans la catégorie reine, se félicite-t-il. J’ai un bel Imoca grâce au Groupe Apicil. Jusqu’à présent, j’étais en Class 40 et là, je passe au-dessus. Je suis comblé ! Cela décuple le plaisir tellement cela été compliqué de rencontrer des gens pour trouver un sponsor. » C’est sans main gauche mais avec

toutes les qualités d’un bon skipper que le Français prendra le départ du tour du monde en solitaire. «Damien sait tirer avantage de son handicap pour trouver des partenaire­s et s’entourer de gens compétents. L’avenir est devant lui. Il est tout à fait capable de faire un podium sur une Transat ou un Vendée Globe. Il a le mental et les qualités physiques pour réussir », abonde Thierry Poirey. Avant le Vendée Globe, il y aura la Route du Rhum en novembre 2019 comme répétition générale. Accompagné dans son projet par l’incontourn­able Jean Le Cam, Damien Seguin sera sous son aile jusqu’au 8 novembre 2020, date du grand départ des Sables d’Olonne. Et pour celui qui vient de décrocher son 20e succès en coupe du monde, pas le temps de se reposer. Dès lundi, le skipper découvrira son Imoca et débutera sa préparatio­n pour devenir le premier champion paralympiq­ue à participer au tour du monde en solitaire.

Ton juron préféré ?

Tabernacle !

Si tu étais un acteur ?

Tom Cruise.

Ton sportif préféré ?

Carl Lewis. C’est lui qui m’a donné l’envie de faire du sport de haut niveau et de faire les Jeux. En rentrant dans le stade olympique en , j’ai pensé à ces images de quand j’étais gamin.

Ce que tu détestes faire ?

La cuisine ! J’aime bien mettre les pieds sous la table (rires).

Une destinatio­n ?

Tahiti.

Ton réseau social préféré ?

Twitter.

Si tu n’avais pas fait de la voile ?

Du trail ou des raids, pour ce lien avec la nature.

Ton équipe préférée ?

L’OM !

Ton joueur préféré à l’OM ?

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(Photos DR/Jesus Renedo, A. R. et Valérie Le Parc)

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