DJ Cut Killer & Mouloud Mansouri : « On est là pour leur ouvrir des portes »
La prison, il connaissait déjà pour s’y être produit en concert dans le cadre du programme Hip-Hop Convict. Mais il n’avait encore jamais mis les pieds au Centre Pénitentiaire de La Farlède, «la prison la plus neuve et la plus clean » qu’il n’ait jamais vue. Cut Killer, le DJ le plus célèbre de France - pour les puristes - fait partie (avec les DJ Djel, Thaï Thaï et San Loco) des quatre artistes qui ont donné de leur temps, de leur énergie, et de leur savoir-faire aux détenus varois.
« Pas facile de trouver du taf quand tu sors de prison »
Le roi de la platine n’a « pas hésité une seule seconde » à répondre à l’appel de son pote Mouloud Mansouri. « Ce que je trouve intéressant, expose-t-il simplement entre deux sessions en prison, c’est de proposer quelque chose qui leur servira peutêtre pour la réinsertion. On leur offre surtout l’opportunité de s’ouvrir à la culture, parce que derrière, insiste-til, c’est dur. Pas facile de trouver du taf quand tu sors de prison. » Après avoir purgé sa peine de dix ans pour trafic de shit, Mouloud Mansouri sait de quoi il parle. « J’ai eu le temps de voir qu’il ne se passait rien en prison. Ça m’aurait plu, ditil, de voir débarquer Cut Killer à l’époque. On est donc là pour leur ouvrir des portes et d’autres horizons. C’est sûr qu’ils ne deviendront peut-être pas tous des Cut Killer 2, tempère le Toulonnais. On ne sait pas s’ils en feront leur métier, mais au moins, on leur propose quelque chose. » L’ancien détenu regrette au passage la baisse de subventions générale dont est victime son association. « On se sent un peu abandonné, ditil, quand on voit ce que touchent les grands théâtres du département. On aimerait que les choses soient un peu plus équilibrées. » En organisant ces ateliers, l’idée est aussi de soumettre un « cadre » aux détenus. Strict mais motivant. «À partir du moment où ils ont ce cadre, avec des artistes confirmés, poursuit « Monsieur Killer », on voit qu’ils sont à l’écoute, très réactifs et supermotivés à l’idée de découvrir l’aspect artistique de notre métier. »
« On voit qu’ils ont envie... ils se mettent la pression »
La plupart d’entre eux n’avaient jamais touché une platine de leur vie. Il a donc fallu commencer par leur apprendre les bases. « Compter les temps et tenir le rythme avant de se mettre à scratcher». Et éviter ainsi qu’ils ne « partent en freestyle » .Car l’affaire est très sérieuse. «Je ne veux pas que les mecs viennent là pour passer le temps », recadre Mouloud. Des cinq détenus (sur quinze) sélectionnés au début de l’aventure, il n’en reste effectivement plus que trois. « L’un a lâché parce qu’il ne se sentait pas de tenir jusqu’au bout. Et un autre est arrivé avec une heure de retard donc on ne l’a pas gardé ». Au terme d’une dizaine de jours d’atelier, les DJ en herbe ont en tout cas eu le loisir de « se rendre compte que le mix était un vrai métier et qu’il y avait du travail derrière. Mais on voit qu’ils ont envie parce qu’ils se mettent la pression… »