Var-Matin (La Seyne / Sanary)

TOP  (BARRAGE, TOULON - LYON, VENDREDI  MAI À  HEURES AU STADE MAYOL) « Deux quarts, c’est le Smic »

Le président du RCT n’avait jamais connu une saison aussi difficile. Pour autant, Mourad Boudjellal ne se dérobe pas et conserve intactes toutes ses ambitions de titre

- Propos recueillis par Paul MASSABO Photos : Dominique LERICHE, Frank MULLER et Luc BOUTRIA

Parti à Pau pour voir jouer les jeunes pousses toulonnais­es, Mourad Boudjellal a traité les affaires courantes cette semaine avant de s’accorder un break. Il sait – si tout va bien – que les trois prochaines semaines pourraient bien être rudes. Sportiveme­nt et nerveuseme­nt. Il recharge les accus pour être pile aux rendez-vous. Et de se livrer avant l’heure.

L’objectif des barrages est atteint ?

En effet, c’était le but de la saison. On sait que disputer les barrages, même à domicile, peut être un piège. Et d’un autre côté, aller directemen­t en demie peut l’être aussi. Mais jouer ce quart à la maison permet de saluer une dernière fois notre public, qui nous donne tant de force.

La saison a été compliquée. Vous le confirmez ?

C’est la saison la plus compliquée que j’ai connue. C’est la première fois qu’on perd autant de matches à la dernière minute. Notre éliminatio­n contre le Munster a été traumatisa­nte. On s’en est relevé en parvenant à aller chercher notre qualificat­ion pour ces barrages. Ça montre qu’on a quelque chose dans le pantalon. Mentalemen­t, on est fort. Si on est préservé des blessures, on a les moyens de réaliser de grandes choses.

Avez-vous douté en cours de saison ?

Après la défaite à Agen, je ne pensais pas qu’on terminerai­t dans les six. Ensuite, j’ai été très énervé au soir de l’échec à Oyonnax. Il est chanceux que là où on a péché, nos adversaire­s directs aient eux aussi échoué. J’espère que la saison se terminera mieux qu’elle n’a commencé.

S’habitue-t-on à prendre part aux phases finales ?

Depuis qu’on est dans le Top , on a participé à huit finales, dont cinq au cours des six dernières années. On est la seule équipe à s’être qualifiée pour la sixième fois consécutiv­e en demie. Ça pourrait même faire sept si tout tourne bien contre le LOU. On a vu l’accident qu’à connu Toulouse la saison dernière ou encore Clermont, champion de France en titre, et La Rochelle cette année. Pour l’instant, à Toulon, on a évité les trous d’air et c’est là une vraie performanc­e, mais je ne sais pas si ça durera éternellem­ent.

Pour vous, la saison est-elle d’ores et déjà réussie ?

Prendre part aux deux quarts (l’Europe et ce barrage, Ndlr), pour Toulon, c’est le Smic. Mais ici, on est comme les gens qui descendent actuelleme­nt dans la rue. On en veut un peu plus. On espère même pouvoir aller manifester à Paris le  juin (date de la finale de Top , Ndlr).

Affronter Lyon, avec Pierre Mignoni en tête de cortège, c’est sympa ?

Le LOU est vraiment une belle équipe. C’est le tube de la saison. Nombre d’anciens Toulonnais auront le sentiment de jouer à domicile. Je pense que ça va faire tout drôle à Pierre d’occuper le vestiaire des visiteurs.

Quand vous voyez la réussite avec Lyon de l’ancien adjoint de Bernard Laporte, avez-vous des regrets de l’avoir laissé partir ?

Les regrets, ce sont les sentiments des faibles. Pierre a bénéficié d’un bon prof avec Bernard et de bons élèves à l’image de Wilkinson, Giteau… C’est moi qui lui ai donné sa chance. J’espère qu’un jour il reviendra…

Après la saga des entraîneur­s la saison dernière, êtes-vous satisfait de Fabien Galthié et de l’ensemble du staff cette saison ?

Fabien et Fabrice (Landreau) sont entrés dans la peau des coaches petit à petit. Je ne suis pas déçu de l’investisse­ment de chacun. Je sais qu’avec Marc (Dal Maso), ils en ont encore dans le moteur. Leur difficulté, c’est qu’on est dans le comparatif (avec les résultats obtenus par Bernard Laporte, Ndlr) et qu’ils doivent un peu supporter cette comparaiso­n. Après, je sais qu’ils ont les moyens d’écrire leur histoire.

Le RCT est-il en phase de mutation ?

Je souhaite retrouver une identité plus toulonnais­e, comme je l’avais dit il y a déjà quelques années. C’est simplement plus long que prévu. Le public est en demande et nous aussi. Mon rôle est de sécuriser les joueurs issus de la formation toulonnais­e. On peut faire de grandes choses avec cette génération. C’est mon devoir de président et de capitaine de cette entité. On a de l’or entre les mains.

Ils en ont encore dans le moteur ”

D’où la naissance de la prochaine « fabrique à champions » ?

Si je suis allé à Pau, c’était pour voir jouer les jeunes (Carbonel, Gahetau, Rebbadj, Setiano, Soury...). On a encore les frères Vernet, Gros et d’autres. On fait signer d’autres espoirs. On a un très beau projet avec l’annexion d’une propriété de quatre hectares jouxtant Berg. Les installati­ons seront magnifique­s. Cette fabrique aura une identité du Sud, de la région Paca. C’est mon côté nationalis­te.

Êtes-vous vexé quand on vous fait remarquer que vos installati­ons ne sont pas à la hauteur de votre palmarès ?

Grâce à la redistribu­tion effectuée par la Ligue, certains clubs ont investi dans les installati­ons, d’autres comme nous ont financé une équipe. Et personne n’a dit merci. Nous, on construit par étapes en mettant en place des structures. Mais quand certains clubs regarderon­t dans leurs confortabl­es installati­ons les barrages à la télé, nous, on les jouera.

On a vu après la victoire de Perpignan sur Grenoble en finale d’accession de Pro D, un stade Aimé-Giral en liesse, une pelouse envahie, une véritable communion. Pourrait-on voir, un jour, de nouveau s’exprimer le sens de cette fête à Mayol ?

Le stade plein comme on l’a vu contre Castres, ça fait du bien. À nous de nous montrer dignes de ce retour d’engouement. Ceci étant, je suis aussi psychorigi­de, j’ai été touché par le drame de Charlie Hebdo. J’étais proche de ces gens-là. Je veux des conditions optimales de sécurité. Je ne veux pas perdre le contrôle.

On vous a reproché votre propos (« on va tout casser à Lyon ») pris au premier degré. Les regrettezv­ous ?

a posteriori J’ai oublié que j’avais affaire à des crânes rasés. Aujourd’hui, je rêve que l’OM gagne la Ligue Europa et qu’il n’y ait pas un seul pot de fleurs cassé dans Lyon. J’espère que les supporters encourager­ont leurs favoris et mettront une ambiance de feu sans créer le moindre incident.

On en veut un peu plus ”

Décidément, vous avez régulièrem­ent des problèmes avec vos propos tantôt provocateu­rs tantôt outrancier­s ?

J’ai une culture undergroun­d qui crée des situations décalées. Je suis décalé dans la vie comme dans le monde du rugby. Si ce n’était pas le cas, je serais aimé de tous. Dans la vie, il y a, selon moi, deux façons de réussir : soit en se montrant consensuel donc pas dangereux du tout, soit en disant ce qu’on pense. Voilà pourquoi il faut aller chercher ce qu’on ne vous donne pas…

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