« Face à face entre l’horreur et la beauté » à la Maison du Cygne
Avec « Chroniques d’un monde réél », Anne Saligan ne se contente pas d’exposer ses oeuvres qui évoquent la guerre du Vietnam et l’agent orange, elle a aussi échangé avec son public
Attention, il ne reste plus que quelques jours pour découvrir les oeuvres d’Anne Saligan ! Son exposition “Chroniques du monde réel” se termine en effet ce samedi 19 mai au centre d’art de la Maison du Cygne. Lors de sa rencontre avec le public, samedi après-midi, l’artiste est revenue sur la guerre du Vietnam, et notamment sur l’utilisation de l’agent orange : « À la demande de John Fitzgerald Kennedy, alors président des États-Unis, cette arme chimique a été créée pour détruire la forêt vietnamienne, où la population se cachait. On l’a appelé l’agent orange car cette dioxine était transportée dans des fûts oranges. La population a non seulement eu sa forêt détruite mais également toute la nappe phréatique polluée. Aujourd’hui encore, des enfants naissent avec des handicaps sévères. La végétation est redevenue verdoyante mais la pollution est toujours présente ».
« Susciter un éveil »
Si sa peinture semble être engagée, Anne refuse cette étiquette qu’elle trouve réductrice : « Un prof m’a dit un jour que l’art devait éveiller. Je n’ai pas de réponse sur l’agent orange mais peut-être que cela va permettre à certains de connaître ce problème et de s’y pencher. Peut-être que cela va susciter un éveil. À chacun de se positionner sur le sujet ». Un spectateur, très sensible aux oeuvres, est surpris de voir que, malgré les horreurs dénoncées, la peinture d’Anne reflète la beauté du monde : « Pour cette série “Chroniques du monde réel”, j’ai constitué un dossier d’images. Après imprégnation, quand je suis dans l’atelier, je m’occupe essentiellement de la plastique. J’ai d’ailleurs utilisé de l’acétone, autre produit nocif pour pouvoir travailler en jus et découvrir la toile. Je travaille aussi beaucoup sur le motif qui fait presque oublier l’épandage mortel. Dans ma peinture, les enfants grabataires sont associés à des motifs floraux. L’horreur est peutêtre plus regardable ».
Agir pour un monde meilleur
Danielle De March, présidente de l’Association d’amitié franco-vietnamienne, est fière d’Anne, qui est la première en France à parler du sujet : « Elle crée un face-àface entre l’horreur et la beauté. J’avais 20 ans quand la guerre a eu lieu et j’étais jeune maman. Je pensais à ces femmes courageuses, ces résistantes qui ne pouvaient pas dire “à demain” à leurs enfants... Je suis fière que, depuis 2011, grâce à une prise de conscience collective, on ait eu envie d’aider cette population depuis le Var. Nous avons ainsi fait appel à La Croix-Rouge vietnamienne pour savoir quels étaient les besoins et nous avons réalisé quatre projets : achat d’un troupeau de vaches, construction d’une école maternelle, nous avons rendu opérationnel un dispensaire et actuellement nous créons des bassins pour fournir de l’eau potable ». Cette exposition appelle à regarder autrement notre monde réel et peut-être à agir pour qu’il devienne meilleur.