Var-Matin (La Seyne / Sanary)

FARHADI MARDI, DIMANCHE PANAHI

-

Deuxième réalisateu­r iranien en compétitio­n après Asghar Farhadi, qui a fait l’ouverture du Festival avec Everybody Knows, Jafar Panahi n’a encore pas pu venir y présenter son nouveau film 3 Visages. C’est devant un siège vide portant son nom qu’a eu lieu la projection officielle. Condamné pour « réaction contre la sécurité nationale et propagande contre le régime», interdit de travailler et de voyager, le cinéaste de 57 ans a fait de sa condition de réalisateu­r empêché la matière même de ses derniers films. Après Taxi Téhéran (Ours d’Or 2015), 3 Visages est une nouvelle variation sur ce même thème. Le film débute de manière particuliè­rement dramatique par la vidéo d’une adolescent­e voilée qui filme en direct son suicide dans une grotte, en demandant à sa meilleure amie de faire parvenir la vidéo à une célèbre actrice de série télé du pays (Behnaz Jafari). Avant de se pendre, la jeune fille (Marzieh Rezaei) explique avoir essayé en vain de contacter l’actrice pour qu’elle vienne convaincre ses parents de la laisser faire du cinéma. Sans réponse de sa part, et contrainte au mariage avec un homme qu’elle n’aime pas, elle n’a trouvé que la mort comme échappatoi­re à une condition qui lui est devenue insupporta­ble. La scène suivante se passe dans la voiture de Jafar Panahi, où le réalisateu­r et l’actrice en question parlent de la vidéo en se demandant si c’est un mauvais canular, un chantage ou un véritable suicide. Ils roulent vers la région où habite la jeune fille pour en avoir le coeur net…

UN FILM ENGAGÉ ET FÉMINISTE Jafar Panahi a de nouveau transformé sa voiture en studio de cinéma pour aborder les thèmes qui lui sont chers : l’absence de liberté, le sort des femmes et le poids des traditions. Mais il en sort, cette fois, pour filmer les habitants d’un village reculé des montagnes du Nord-Ouest de Téhéran, où on a beau être fans de séries télé, il est inconcevab­le qu’une fille veuille faire ce métier de « saltimbanq­ue » (sic). Mélange de drame et d’humour à la manière du néoréalism­e italien, le film est épatant, aussi bien sur la forme (un premier plan séquence virtuose) que sur le fond : 3 Visages est probableme­nt le film le plus engagé et féministe de l’édition.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France