Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Au cap Sicié, la vie marine reprend ses droits

Une plongée réalisée hier valide l’intérêt du projet de reconquête écologique mené au pied de la station Amphitria, qui traite les eaux usées de 350 000 habitants de l’aire toulonnais­e

- M. G. mguillon@nicematin.fr

C «’est top ! Les récifs artificiel­s immergés en 2015 sont restés en place dans cette zone très exposée aux courants et aux tempêtes. Nous avons vu une grande diversité en termes de faune et de flore, des milliers de poissons, des coquillage­s, des algues… Depuis un an, date de notre dernière plongée, tout a beaucoup poussé ; c’est la preuve que cette expérience pilote est un succès ». Tout juste remontés à la surface, les plongeurs mobilisés dans le cadre de l’opération « Remora » sont aux anges. Sur ce site fortement dégradé par des décennies de rejet d’eaux usées non traitées, la vie marine a repris son cours. Pourtant, les partenaire­s de ce projet collaborat­if (porté par le Pôle Mer, cofinancé par l’Agence de l’eau Rhône-Méditerran­ée-Corse et la fondation Véolia, en partenaria­t avec l’Institut PaulRicard), partaient de loin. À l’origine, il y a un constat effrayant dressé, il y a plus de 40 ans, par Nardo Vicente, directeur scientifiq­ue de l’Institut océanograp­hique Paul-Ricard. Dans les années 1970, il plonge à la pointe du Cap Sicié et filme « l’enfer » engendré par le déversemen­t ici, chaque jour, de 350 000 m3 d’eaux usées.

La Grande bleue a retrouvé sa couleur

Montrant des fonds sous-marins désertique­s et sans vie où les herbiers ont disparu pour laisser place à des fonds boueux jonchés de matières plastiques, ses images ont l’effet d’un électrocho­c : l’aire toulonnais­e aura sa station d’épuration, Amphitria, entrée en service en 1997, pour traiter les eaux usées de La Seyne, SaintMandr­ier, Six-Fours, Ollioules, Toulon, Le Revest et Evenos. Moins de dix ans après, une nouvelle plongée de l’équipe de Nardo Vicente montre que la situation s’était nettement améliorée. « En relevant le défi des eaux usées, Amphitria a redonné sa couleur à la Grande bleue», souligne-t-on chez Véolia, concepteur, constructe­ur et exploitant de cette station. Mais ce n’est que le début de la restaurati­on écologique du site. Car émerge alors le projet Remora, dont l’objectif est de favoriser la reconstitu­tion de l’écosystème. En avril 2015, deux récifs artificiel­s de 360 m³ sont immergés à 15 m de profondeur, en face de la station. « L’objectif était d’amorcer une chaîne trophique (alimentair­e) subaquatiq­ue et que les juvéniles viennent coloniser le site pour se nourrir et s’y mettre à l’abri des prédateurs », précise Emmanuel Plessis, directeur développem­ent pour l’activité eau de Véolia en Provence.

L’expérience va faire école

Les résultats ne se font pas attendre. Dès le printemps 2016, les

premières observatio­ns montrent que les modules immergés commencent à jouer leur rôle d’attraction pour de nombreux poissons, crustacés, étoiles de mer, oursins, concombres de mer… Surtout, des espèces pionnières d’algues amorcent une colonisati­on. Un processus qui ne s’interrompt plus, comme l’a démontré la nouvelle plongée réalisée hier sur le site. Les résultats dépassent même les attentes des scientifiq­ues (lire ci-dessous). Trois ans après l’immersion des récifs artificiel­s, la reconquête écologique se confirme et la biodiversi­té reprend ses droits. Le projet « Remora » atteint donc ses objectifs et, fort du succès de cette opération pilote, Véolia envisage déjà de proposer, dans le monde entier, de compléter ses projets d’assainisse­ment par une offre de restaurati­on écologique inspirée de celle mise en oeuvre au cap Sicié !

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(Photos sous-marines Institut océanograp­hique Paul-Ricard) Après trente minutes de plongée, les scientifiq­ues contemplen­t les images qu’ils viennent de prendre sous l’eau, devant la station Amphitria. Ils sont emballés ; pour eux, l’expérience de restaurati­on écologique porte ses fruits.
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(Photo D. Leriche)

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