Var-Matin (La Seyne / Sanary)

DOGMAN MANQUE DE MORDANT

Un nouvel essai sur la corruption de la société par la violence, par le réalisateu­r de Gomorra... La Palme Dog lui est déjà acquise. Et peut-être un prix d’interpréta­tion masculine. Pour le reste, Dogman déçoit un peu...

- par PHILIPPE DUPUY pdupuy@nicematin.fr @djphilip

O n aura au moins appris une nouvelle expression cette année à Cannes :

« laisser en chien ». C’était dans le film À genoux les gars d’Antoine Desrosière­s. Un des rares pourvus de quelques bonnes punchlines. Si on en élargit l’acceptatio­n, du domaine purement sexuel au plan cinématogr­aphique, « laisser en chien » pourrait facilement se traduire par : « rester sur sa faim ». Et Dieu sait qu’on aura eu l’occasion d’en faire l’expérience dans cette sélection ! Notamment avec Dogman le nouveau film de Matteo Garrone, réalisateu­r italien chouchou du Festival où il a reçu le Prix du Jury pour Gomorra en 2008 et un Grand Prix pour Reality en 2012. Si Gomorra, film de mafia adapté du livre de Roberto Saviano, nous avait effectivem­ent emballés par son réalisme brut, les suivants incitaient tout de même à se demander si la côte cannoise de Matteo Garrone n’était pas légèrement surévaluée. Notamment avec

Tale of Tales, conte baroque qui avait laissé la Croisette plus que dubitative en 2015. L’annonce du retour du réalisateu­r italien à une veine « Gomorresqu­e » incitait pourtant à l’optimisme. Et effectivem­ent au début de

Dogman, on y croit. Dans une petite ville

côtière du sud de l’Italie, Marcello (Marcello Fonte) tient une échoppe de toilettage canin et deale un peu d’herbe et de coke pour arrondir ses fins de mois. Un des clients réguliers de sa deuxième activité, Simoncino (Edoardo Pesce), brute épaisse au tempéramen­t violent qui vient de sortir de prison, le rudoie et l’associe contre son gré à une série de mauvais coups foireux. Le dernier envoie Marcello en prison pour un an. Mais le petit homme refuse de dénoncer son complice, espérant toucher sa part du butin et éviter de se faire casser la figure à sa sortie. Espoirs déçus, qui l’entraînero­nt dans une spirale de violence vengeresse… Entamé en forme d’hommage au néoréalism­e social italien, avec une belle descriptio­n de la vie des habitants de cette petite ville maritime grisâtre, gangrenée par la misère, les trafics et la violence, Dogman vire dans sa deuxième partie au revenge movie ultra-violent. Un virage très laborieuse­ment négocié, avec une fin qui laisse une nouvelle fois perplexe. Malgré de belles qualités photograph­iques et un casting formidable (quelles gueules !), Dogman manque de mordant et déçoit. Dans une sélection où les bons rôles masculins se comptent sur la moitié des doigts d’une main, Marcello Fonte fait toutefois figure de favori au palmarès. Sinon, on ne voit que la «Palme Dog». Pour le chien Jack, amateur de pasta, ou pour le pitbull anonyme du début que Marcello parvient à amadouer à force de douceur et de patience. Contrairem­ent à son homologue humain Simoncino…

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