Var-Matin (La Seyne / Sanary)

DANIEL COHN-BENDIT

« J’en ai marre du ‘‘y’a qu’à’’. Moi, j’ai des doutes » Après le poing levé des Black Panthers (Spike Lee), celui de Mai 68 (Dany). Grand Soir hier pour Cohn-Bendit venu présenter La Traversée avec Romain Goupil.

- par FRANCK LECLERC fleclerc@nicematin.fr

E n 2014, il avait sauté dans un minibus pour sillonner le Brésil pendant le Mondial. Cette fois, c’est à la rencontre des Français que Daniel CohnBendit embarque pour les besoins de La Traversée. Quinze mille kilomètres avec Romain Goupil. Des rires et des débats. Une engueulade, aussi. Autour du traitement de l’élection du président Macron. Le résultat : 2 h 20 d’images sans bavardage à découvrir ce lundi, à 20h50sur France 5.

Vous avez cru très tôt à l’élection de Macron. Enthousias­me intact?

Je l’ai senti dès 2016 alors que les observateu­rs traditionn­els n’y

croyaient pas. Aujourd’hui, j’approuve son discours sur l’Europe, même si nous ne sommes pas des compagnons de route. On a des points de désaccord, dont l’immigratio­n. Nous avons signé avec Romain Goupil une tribune sur le devoir d’hospitalit­é. Quel que soit mon interlocut­eur, je ne débats de cette question que si l’on signe ensemble une phrase: c’est insoluble. Que personne ne vienne me dire qu’il a la solution. C’est comme le terrorisme. Un sondage dit que les Français ne font pas confiance à Macron sur le terrorisme? C’est du baratin. Si un barjo quelconque sort un couteau, qui peut agir? Moi, j’ai des doutes. J’en ai marre du « y’a qu’à ».

La Traversée n’est pas un film militant. Aucun jugement…

On ne veut rien démontrer. On donne la parole à tout le monde. L’idée étant de faire un état des lieux de cette mosaïque qu’est la France, dans toute sa diversité. Un dîner avec une vingtaine de sympathisa­nts du FN, ça m’intéresse. Que j’aime ou non, ça fait partie de la France.

Vous dites que la France est un beau pays. Vous êtes optimiste?

Je sais qu’il y a plein de problèmes, mais il faut être optimiste. Il y a une envie de débattre dans ce pays qui montre une volonté de s’en sortir. Oui, l’utopie. J’ai toujours des rêves.

Cinquante ans après Mai 68, quel bilan ?

Si vous voulez mesurer vraiment ce que représente un demi-siècle, plongez-vous encore 50 ans auparavant. 1918, les poilus. Peut-on comparer la guerre du Vietnam avec les tranchées ? Évidemment non. La France de 2018 est un tout autre pays que celle de Mai 68. Le nucléaire civil, la dégradatio­n climatique, l’écologie... à cette époque on ne connaissai­t pas. Mai 68 aura été un grand moment de ma vie. Mais nom de Dieu, l’Histoire ne s’arrête pas ! C’est comme faire l’amour : si c’est bien seulement la première fois, c’est malheureux !

Dur d’être un symbole ?

Je suis un symbole, d’accord. Mais ce qui compte, c’est que les gens aiment discuter avec moi. Durant ce tournage, à aucun moment la discussion n’a été difficile.

Et avec Mélenchon, il y a débat?

La gauche est critique sur le style vertical, autoritair­e, de Macron. C’est vrai. Mais la France insoumise, idem. Le FN, idem. La société française, visiblemen­t, a besoin de cette verticalit­é. Ce que je trouve chez Macron, c’est un volontaris­me européen. Pour moi, c’est ça le principal.

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« Je suis un symbole, d’accord. Mais ce qui compte, c’est que les gens aiment discuter avec moi. »

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