Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Les Bleus, un juteux business pour la FFF

Kylian Mbappé, Ousmane Dembélé, Paul Pogba, Antoine Griezmann, les Bleus n’ont jamais eu autant d’atouts... pour les sponsors. Et ça marche. Décryptage d’une poule aux oeufs d’or

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En 2010, après la grève des Bleus à la Coupe du monde en Afrique du Sud, l’équipe de France redoutait d’être lâchée par ses sponsors. Huit ans plus tard, elle ne s’est jamais aussi bien portée sur le plan financier et représente le poumon économique de la Fédération. Au total, les Bleus devraient générer un minimum de 113 millions d’euros de recettes en 2018-2019, soit plus de 60% des ressources commercial­es globales de la FFF (181,6 millions d’euros dans le budget prévisionn­el). Et ce chiffre pourrait augmenter si la France atteint au moins les quarts de finale à la Coupe du monde en Russie... Pour l’économiste du sport et délégué général de l’Union Sport et Cycle Virgile Caillet, « sur le plan du modèle économique, la FFF est incontesta­blement une formidable réussite. Elle s’appuie sur le fameux contrat Nike, qui a permis de conserver une grosse crédibilit­é et de passer l’orage de Knysna », le fiasco du Mondial-2010 en Afrique du Sud. La bonne santé financière des Bleus, et donc de la FFF, repose en effet sur ce contrat avec la marque à la virgule, re-signé en 2016 pour 50,5 millions d’euros par an sur la période 2018-2026, soit l’un des contrats les plus élevés au monde à l’échelle d’une sélection nationale. Autant dire que ce puissant soutien est chouchouté, jusqu’aux moindres détails. Sur la photo officielle de l’équipe de France pour ce Mondial-2018, on place volontiers au premier rang les joueurs qui portent des Nike aux pieds. Et on se garde bien de faire apparaître le ballon officiel de la Coupe du monde, siglé... Adidas. Au total, la FFF compte sur 102,1 millions d’euros de partenaria­ts la saison prochaine. Après Nike, viennent le Crédit Agricole et PMU (au moins 8 millions d’euros par an chacun), Volkswagen (environ 5,5 millions d’euros), Orange et EDF (environ 5 millions d’€ chacun). Puis les partenaire­s officiels des Bleus (AccorHotel­s, KFC et Intermarch­é - au moins 1,5 million d’€ chacun) et les fournisseu­rs (Coca-Cola, Pasquier, Belin, et Archos) contre un ticket d’entrée d’un minimum de 500 000 euros annuels, selon le journal L’Equipe. Hormis Archos, tous ont prolongé leur sponsoring jusqu’en 2023, et la FFF n’a pas eu besoin de beaucoup chercher pour remplacer Carrefour - qui se recentre sur l’alimentair­e et veut réduire ses dépenses - par Intermarch­é. « On a la garantie financière sur les cinq années qui viennent. Qu’on soit formidable­s ou pas à Moscou (les Bleus au Mondial), tous nos contrats sont renouvelés », s’est d’ailleurs félicité le président Noël Le Graët dans un entretien accordé à l’AFP en milieu de semaine. « Coca, c’était fait depuis deux mois mais on a signé lundi (avant France-Irlande) parce que le président voulait signer sur le terrain (du Stade de France). Manque de pot, il pleuvait!», a-t-il poursuivi en riant. Mais l’omniprésen­ce des Bleus et de leurs sponsors dans la stratégie de la Fédération fait parfois grincer des dents au niveau local. C’était d’ailleurs l’un des principaux reproches des opposants de Noël Le Graët lors de sa réélection en mars 2017. « La fédération n’est pas qu’une entreprise. On compte plus sur l’équipe de France que sur les Ligues et les districts. Quand la Fédération ne s’appuie que sur l’image de l’équipe de France, ça fragilise l’économie », dénonçait alors Jamel Sandjak, le patron de la Ligue de Paris Ilede-France. Pas de quoi perturber Noël Le Graët qui a l’habitude de dire que «quand l’équipe de France va bien, le football amateur va mieux » et qui vient d’annoncer une hausse des moyens mis à dispositio­n du football amateur, pour atteindre plus de 80 millions d’euros. « La stratégie fédérale ne peut pas exister sans moyen et le principal actif, ça reste l’équipe de France. C’est le baromètre », juge également l’économiste Virgile Caillet. « Et le contrat avec Nike est malin, car il mentionne aussi des retombées pour le monde amateur ». Dans son rapport annuel, la Cour des comptes a de son côté dénoncé certaines dépenses de la direction actuelle dont un Airbus à 1 million d’euros affrété en 2014 pour amener une délégation de dirigeants du foot amateur et de partenaire­s au quart de finale France-Allemagne à Rio. Mais là encore, Le Graët a balayé ces critiques et s’apprête à reconduire le même dispositif en Russie. Car les Bleus sont la vitrine de la FFF et son bien le plus précieux.

Une garantie financière jusqu’en  ”

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(Photo C.Dodergny) Mbappé - Dembélé, deux des joyaux des Bleus sur et en dehors du terrain.

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