Migrants: malgré les tensions, Conte vient voir Macron
Le chef du gouvernement italien Giuseppe Conte a maintenu, hier, sa rencontre aujourd’hui à Paris avec le président français Emmanuel Macron malgré les grandes tensions diplomatiques entre les deux pays sur la question des migrants, qui met au défi l’unité de l’Europe. L’exécutif italien avait menacé d’annuler ce rendezvous, faute d’excuses officielles d’Emmanuel Macron. Celui-ci avait dénoncé mardi « la part de cynisme et d’irresponsabilité du gouvernement italien » dans la gestion de l’Aquarius, le navire humanitaire chargé de plus de 600 migrants clandestins que Rome avait refusé de laisser accoster.
Macron joue l’apaisement
Les deux gouvernements ont publié le même communiqué (sans pour autant être un communiqué commun) jeudi matin. Il annonce que les deux hommes, qui se sont entretenus au téléphone, ont convenu, en raison du sommet européen fin juin à Bruxelles, que des « nouvelles initiatives à discuter ensemble étaient nécessaires », eta confirmé le déjeuner prévu à Paris qui sera suivi d’une conférence de presse conjointe. « Le président de la République a souligné qu’il n’avait tenu aucun propos visant à offenser l’Italie et le peuple italien », selon ce texte qui, sans formuler d’excuses officielles françaises, joue sur l’apaisement entre les deux parties. M. Macron « a rappelé qu’il avait toujours défendu la nécessité d’une solidarité européenne accrue avec le peuple italien », selon le communiqué. Interrogé par des journalistes avant d’entrer au Palais Madama, siège du sénat italien, M. Conte a déclaré que, « oui absolument », le contentieux était clos, ajoutant que M. Macron « tenait beaucoup à maintenir cette invitation à déjeuner ». La relation entre Paris et Rome, de plus en plus tendue du fait de la pression migratoire qui tétanise l’Europe entière, s’est brusquement dégradée depuis la crise du navire Aquarius.
La politique migratoire mise à mal
Au-delà de la querelle franco-italienne, l’errance méditerranéenne du bateau, attendu samedi soir à Valence en Espagne, a mis en lumière la vacuité de la politique migratoire européenne, tiraillée entre les positions très divergentes de ses Etats membres. La crise intervient avant un Conseil européen crucial les 28 et 29 juin, qui doit porter en particulier sur la question des migrants. Un journaliste ne devrait pas dire ça, sauf à cracher sur son gagne-pain. Ni la carte de presse ni la reconnaissance du ventre n’interdisent cependant la lucidité. Et l’acrimonie s’aiguise forcément quand on mesure à quel point les puissants nous baladent, nous orientent, bref se jouent de nous au gré de leurs mises en scène. Dernier épisode en date, cette vidéo élyséenne négligemment balancée mercredi sur les réseaux sociaux. La formule « pognon de dingue » a beaucoup fait gloser, caillou dans la bouche supposée policée d’un président de la République. Mais là n’est pas l’essentiel. Il réside davantage dans la façon dont on tient le citoyen pour un fieffé couillon, en faisant mine de l’inviter au coeur du pouvoir, dans une intimité factice qui soulève le coeur. Cet art des « faux moments vrais », Emmanuel Macron en use et en abuse. Si l’on en croit le document consacré mercredi par France à Brigitte Macron, il l’a largement apprivoisé pour capitaliser sur son couple durant la campagne. Sûr qu’il pourrait donner d’utiles conseils en la matière à Laurent Wauquiez, qui continue de payer très cher un moment d’égarement devant les étudiants lyonnais, qui pour le coup n’était pas feint. Ou alors c’est une jolie catastrophe industrielle. Macron n’est certes pas le premier à ériger la com en vertu souveraine. D’autres ont épuisé le modèle avant lui. Y compris… de Gaulle, dont les savoureuses conférences de presse étaient beaucoup plus travaillées qu’il n’y paraît. Les sorties jubilatoires sur la chienlit, le volapük ou les sauts de cabri n’avaient, sans doute, rien d’improvisé. Mais le petit théâtre gaullien, parce qu’il était rare, exhalait quand même une autre saveur.