Var-Matin (La Seyne / Sanary)

L’effet Maréchal

- Journalist­e, écrivain et chroniqueu­r TV edito@nicematin.fr

Un hologramme flotte sur la vie politique française. Une jeune femme blonde qui, à l’instar de l’Arlésienne de Daudet, à peine entrevue aussitôt disparue, suscite d’autant plus d’intérêt et de curiosité qu’elle s’est volontaire­ment effacée de la scène politique. Marion Maréchal réussit en effet le tour de force d’être vue comme l’étoile montante de la droite, alors qu’il y a un an, elle annonçait son retour à la vie civile, devenant à  ans (aujourd’hui ) la plus jeune retraitée de la vie politique, après avoir été à  ans la plus jeune députée de l’histoire de la République. Était-ce calcul de sa part ? Prendre du recul et attendre son heure ? Pour les commentate­urs, en tout cas, l’affaire ne faisait pas de doute : elle reviendrai­t. La marionolog­ie devint un genre journalist­ique, cousin des arts divinatoir­es. Jamais absence n’a été plus commentée, jamais silences plus interprété­s. Elle ne dit rien ? Ca fait un papier. Elle parle ? Un gros titre. Elle renonce au patronyme Le Pen ? La « une », coco ! Et lorsque, hier, elle inaugure à Lyon son Institut de sciences sociales, économique­s et politiques (ISSEP), on se bouscule comme à un baptême princier. Drôle d’école, entre parenthèse­s. Mini Sciences Po ou Réac Academy ? Faut-il croire la directrice lorsqu’elle dit qu’avec son ISSEP, elle part « à l’assaut de la prison intellectu­elle où les jeunes Français sont pris en otages » par la gauche ; ou le président honoraire de l’école, quand il affirme qu’il n’est « pas là pour faire de la politique » et déroule le credo managérial en usage dans toutes les business schools ? Jamais en tout cas une petite école privée ( élèves en magistère, pas de diplôme reconnu), n’aurait pu rêver d’une telle couverture presse. C’est l’effet Maréchal. Est-ce à dire qu’elle ne serait qu’une fabricatio­n des médias, comme on l’entend ? Pas si simple. C’est vrai qu’elle a profité à plein de l’effet de loupe d’un système qui n’aime rien tant que les nouvelles têtes et les conflits à venir. Et quelle plus belle affiche que le duel (annoncé) de la tante et de la nièce ? Mais il n’y a pas que ça. Si une responsabl­e politique en stand-by, sans mandat, ni programme, a réussi à faire son trou dans l’opinion au point qu’elle devance Laurent Wauquiez chez les électeurs LR et Marine Le Pen chez ceux du Rassemblem­ent (ex-Front) national, cela dit quelque chose de l’état des droites en France. Ce que raconte le « phénomène Marion », c’est tout simplement la tentation de l’union qui travaille les deux familles politiques. Le RN, lassé des défaites à répétition de sa présidente. Et Les Républicai­ns, dont le président peine à rassembler les siens et combattre l’attraction de l’extrême-droite. Et ce, en dépit de la droitisati­on de son discours. En dépit, ou peut-être à cause?

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France