Var-Matin (La Seyne / Sanary)

« Il fallait assurer l’essentiel, c’est fait »

Demi-finaliste de la Coupe du monde en 1982 et 1986, Alain Giresse est en Russie pour Radio France et décortique le début du Mondial des Bleus

- PROPOS RECUEILLIS PAR MATHIEU FAURE

La Coupe du monde, ça le connaît. Double demi-finaliste du Mondial avec les Bleus (1982, 1986), Alain Giresse (47 sélections, 6 buts) est en Russie. Évidemment, l’ancien membre du « carré magique » des Bleus (Platini, Giresse, Tigana, Fernandez) a raccroché les crampons il y a 30 ans mais il continue de parler football. C’est pour le compte de Radio France que l’ancien milieu de terrain de Bordeaux et de l’OM officie. Hier, entre deux avions, «Gigi» s’est livré avec son oeil d’expert.

Alain, que retenez-vous des deux premiers matches de l’équipe de France ?

Il fallait assurer l’essentiel, c’est fait. On voit bien que cette Coupe du monde est difficile pour tous les favoris et la France est déjà qualifiée après deux matches, ce n’est pas rien. Maintenant, il faut faire en sorte d’élever notre niveau de jeu car il faudra être meilleur en huitième de finale. Actuelleme­nt, on peut être interpellé par le niveau de jeu, c’est insuffisan­t.

Que faut-il faire contre le Danemark, faire tourner ou assurer la première place avec l’équipe type ?

Sur le plan comptable, il faut terminer premier et éviter la Croatie en huitième de finale. Certes, un point du match nul assure la première place mais la France n’a pas une grande marge de manoeuvre actuelleme­nt alors il ne vaut mieux pas se lancer dans des calculs hasardeux. Je suis plutôt favorable à une certaine continuité, d’autant que, dans le jeu, c’était mieux contre le Pérou que face à l’Australie. Alors tout changer maintenant que la qualificat­ion est validée, c’est risqué. Il faudrait mieux continuer à engranger de l’expérience, bonifier les automatism­es. La confiance commence à venir, il faut aller chercher un peu plus de sérénité maintenant.

Quels adversaire­s en huitièmes de finale ?

L’Islande, même si on a parfaiteme­nt géré cet obstacle en quart de finale de l’Euro (-) est une équipe compliquée à manoeuvrer. Comme les Australien­s, ce sont des combattant­s, un bloc difficile à bouger. On n’aime pas trop jouer ce genre d’équipe. L’Argentine peut encore s’en sortir mathématiq­uement mais je n’y crois pas trop, ça semble compliqué, surtout après ce que l’on a vu contre la Croatie... Reste le Nigeria, comme en .

Vous qui avez joué deux Coupes du monde, c’est toujours aussi compliqué un premier tour ?

Une coupe du monde demande du temps, il faut se roder. Et puis tout dépend de votre statut. En , on était une équipe qui jouait beaucoup, très technique, car on voulait se montrer, faire quelque chose, exister. On en faisait beaucoup. En , on a commencé le Mondial plus doucement car on avait un autre statut, on était champion d’Europe en titre, demi-finaliste en , on était beaucoup plus attendu. Vous regardez, dans ce Mondial, tous les favoris ont du mal pour le moment, même les équipes établies. Le Brésil, l’Allemagne, l’Espagne ont un onze type, un style de jeu défini mais ils ont du mal à démarrer car ils sont partis du principe qu’ils allaient commencer doucement. Un mondial dure un mois, il faut savoir gérer.

Sur quels détails les Bleus peuvent-ils agir pour la suite ?

Derrière, c’est difficile de changer quelque chose même si Pavard a semblé un peu en retrait contre le Pérou. Au milieu, ça se tient aussi et Pogba a fait le match que l’on attendait de lui. Mbappé est un électron libre, Giroud et Griezmann savent jouer ensemble. Il reste peutêtre une interrogat­ion autour de Matuidi, mais ce n’était pas son poste naturel. Il était dans un registre un peu bancal. Lancer Fékir ou Lemar changerait-il la donne sachant qu’ils auraient moins d’impact défensif que Matuidi ? Je ne sais pas. Face au Pérou, on a été consistant en première période mais on a énormément subi après la pause alors qu’on menait au score. On a été privé de ballons, on n’a jamais réussi à bien l’utiliser quand on le récupérait.

Certains parlent de la chaleur comme un facteur du faible niveau de cette Coupe du monde, qu’en pensez-vous ?

Vous rigolez (rires). Lors de France-Pérou, il faisait douze degrés (rires). A Moscou, oui, il fait chaud mais dans toutes les Coupes du monde il fait chaud. En , on a joué à midi au Mexique, je peux vous dire qu’il fallait s’adapter un minimum... En Russie, la seule différence, c’est que le pays est si vaste que vous avez différents climats. C’est tout.

On n’a pas suffisamme­nt de marge de manoeuvre pour se mettre à calculer contre le Danemark”

Un mot sur Kylian Mbappé, l’attente autour de lui est immense...

Delapartde­qui?

Des supporters, des médias.

Vous avez votre réponse (rires). N’en parlez plus alors, laissez le grandir. Il ne doit pas se polluer l’esprit avec ce que les gens disent sur lui. Il n’a que  ans, c’est déjà énorme ce qu’il fait à son âge. Il va gérer ses matches de mieux en mieux, comment passer d’un temps fort à un temps faible et vice-versa, dans la maîtrise et la lucidité également, il va mûrir. Protégeons-le.

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(Photo Radio France/Christophe Abramowitz) Un quart du carré magique des Bleus derrière un micro.
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