Var-Matin (La Seyne / Sanary)

LE CASTELLET Un motard se tue en allant au travail

Le cas du jeune Tony Barbier, qui s’était mêlé d’une querelle entre protagonis­tes alcoolisés qui ne le concernait pas, a su émouvoir les jurés

- G. D.

Pour une première plaidoirie d’assises, sous la bannière du barreau de Draguignan, Me Lucille Baratte a connu hier un succès peu commun, dans la défense du jeune Tony Barbier. L’avocat général avait requis neuf ans de prison contre ce jeune jardinier de 22 ans, pour avoir donné un coup de couteau mortel dans le ventre de William Sarr, la nuit du 2 au 3 décembre 2016 à Trans-en-Provence. Reconnu coupable de violences volontaire­s ayant entraîné la mort, sans intention de la donner, il a finalement été condamné à cinq ans de prison, dont trois avec sursis. Ce qui, compte tenu des dix-huit mois de détention provisoire qu’il a déjà subis, laisse espérer au jeune homme une sortie de prison proche.

Qui l’aime?

Dans l’ultime interrogat­oire du président Delaunay, Tony Barbier a exprimé ses regrets. « À cause de l’alcool des autres, et parce que je suis intervenu dans quelque chose qui ne me regardait pas, un homme est mort pour rien. » S’agissant de la personnali­té de l’accusé, les membres des services de la commune de Trans ont décrit « un jeune qui voulait vraiment s’en sortir, et avec lequel il n’y avait aucun souci ». « Je l’ai élevé, a témoigné Colette, l’assistant familiale qui a gardé Tony Barbier chez elle jusqu’à ses 19 ans. C’est un enfant qui a beaucoup souffert. Il est arrivé chez nous à 4 ans. Quand il a eu ce travail pour la mairie, ça a été formidable pour lui, il s’est épanoui. » « Il a toujours eu des doutes sur le fait qu’on pouvait l’aimer. Il demandait toujours : “Qu’est-ce que je suis pour toi ?” Quand il est parti, il s’est rendu compte qu’il faisait partie de notre vie pour toujours. »

Selon l’accusation, il avait le choix

« Il s’est pris pour un justicier » ,arésumé l’avocat général Stéphanie Félix, en rappelant que l’accusé s’était armé d’un couteau avant de descendre au pied de son immeuble, pour aider son voisin, armé d’une barre de fer, face à William Sarr et son ami, lui-même armé de deux couteaux. « Mais quand ces deux-là partent, tout danger est écarté. À ce moment-là, William Sarr n’a rien dans les mains, et Tony Barbier a encore le choix de rentrer chez lui. Si le danger était passé, la violence pour s’en préserver était inutile. »

Mauvais geste, mais une provocatio­n

« C’est allé trop vite, a objecté Me Lucille Baratte. Mais il n’en reste pas moins que ce coup est la réponse à une provocatio­n. » Pour elle, au moment où la victime s’était emparée d’un gros pot de fleurs pour le brandir vers Tony Barbier, par peur d’être tué, celui-ci avait eu ce geste réflexe de lui porter un coup de couteau à l’abdomen. « Un mauvais geste. Mais gardez à l’esprit que vous n’avez pas affaire à un délinquant récidivist­e, mais à un gamin à l’enfance douloureus­e, confronté à une tragédie qui le dépasse, celle d’être responsabl­e de la mort d’un homme. »

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(Croquis d’audience Rémi Kerfridin) Les avocates des proches de la victime et le médecin légiste.

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