Var-Matin (La Seyne / Sanary)

De Menton à Roquebrune la guerre des transats

- FLORENT BARDOS

L’histoire n’a rien de nouveau. Pendant l’été, chacun veut sa place au plus près de l’eau. Quitte à arriver aux aurores pour disposer serviettes et parasols à deux pas de la mer et s’en aller pour revenir quelques heures plus tard. Après le déjeuner… ou la sieste ! À Roquebrune-CapMartin, là où la plage est plus étroite qu’à Menton, le sujet ne laisse pas indifféren­t. « Le week-end est le seul moment où je suis tranquille et je ne peux pas profiter de la plage, peste Franck, un commerçant roquebruno­is. Je suis obligé de me mettre là où il reste des places parce que tout est réservé dès 7 heures ! »

Les Italiens dans le viseur

Richard vit au-dessus du Solenzara. Le matin, il a pour habitude de promener son chien sur la promenade Robert-Schumann et il l’assure : « Parfois, une seule personne vient installer des affaires pour un groupe de dix puis repart ». Sa femme, Françoise, s’exaspère: «Comme on est du coin, on ne descend pas à la plage tôt le matin, alors quand on arrive, on doit se mettre derrière ces serviettes vides. Puis d’ajouter : « Si on veut un emplacemen­t réservé, on le paie. » Franck est catégoriqu­e : « Ça fait des années que ça dure, et chaque été c’est pareil, les Italiens reviennent et réservent leurs places». Si cette pratique était répandue de l’autre côté de la frontière, elle y a été interdite en 2 016. Désormais, tout contrevena­nt s’expose en Italie à une amende de 200 euros. En France, aucune sanction n’est prévue pour le moment. Alors, les touristes en profitent.

Une pétition qui a recueilli plus de   signatures

Sur Facebook, la colère est montée d’un cran sur la page « Mouvement contre les places réservées Menton/RCM ». Créée par Mélody Vissio, elle cumule 975 « J’aime ». Elle a aussi lancé une pétition le 4 juin dernier, adressée aux maires de Menton et de Roquebrune Cap-Martin, laquelle a déjà recueilli plus de 1 500 signatures ! Mélody Vissio proteste contre ce qu’elle appelle «l’occupation du domaine public» et soulève une question, « comment cela se fait-il que des parasols et transats parfois imposants puissent rester sans propriétai­re plusieurs heures [...] alors qu’un petit sac oublié en gare ou en aéroport provoque immédiatem­ent l’interventi­on de la police ? » «Libérons nos plages», tel est le mot d’ordre de Mélody Vissio qui encourage, sur Facebook, ceux dont la bronzette est chambardée par la vue de transats ou de serviettes vides à les plier et à les enlever. Tout simplement. Au bord de l’eau, certains passent donc à l’action. « Des personnes poussent les affaires des places vides, replient les matelas, enlèvent les parasols. Alice travaille sur la plage de la baie de Carnolès et constate : «Ces actes sont de plus en plus courants, des gens ont même balancé des affaires à la poubelle, il y a une semaine ». Mais le « Mouvement contre les places réservées Menton/RCM » voudrait voir les mairies prendre de vraies mesures. «Il faudrait qu’un affichage en français et en italien interdise de réserver des places », propose Mélody Vissio. Pour le moment, rien n’est prévu. « La mairie s’en fiche complèteme­nt», déplore, de son côté, Marie-Christine Franc de Ferrière, élue d’opposition à Roquebrune-Cap-Martin. En 2016, elle avait déjà envoyé une lettre ouverte au maire de la commune pour l’alerter sur ce phénomène très local (lire cidessous). Julien, touriste lyonnais, avoue plier son parasol et poser des galets sur ses serviettes lorsque vient l’heure du déjeuner. Lui n’y voit pas de problème. « C’est pratique de laisser les affaires sur la plage. Ça évite de s’encombrer pendant qu’on va manger. Et puis il y a encore de la place ». Il y a aussi des Mentonnais, qui savent faire. Luc, Mentonnais habitué de la plage du Casino ne viendra pas le contredire. « La plage est quand même assez grande pour tout le monde. Je ne trouve pas ça très dérangeant que certains y laissent leurs affaires. »

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(Photo Jean-Sébastien Gino-Antomarchi) Des habitants en ont assez de voir les plages publiques privatisée­s par les matelas, parasols et autres serviettes vides de touristes. Une pétition circule, tandis que sur les réseaux sociaux, la colère monte.

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