Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Des pétards pour éloigner le loup des troupeaux?

Une associatio­n de défense du canidé s’insurge contre cette possibilit­é offerte aux éleveurs dans le parc naturel du Mercantour. La direction du site évoque une « expériment­ation »

- B. G. bguglielmi@nicematin.fr

C’est scandaleux! Honte au parc national du Mercantour et à ceux qui le couvrent!», s’exclame, dans un communiqué de presse, l’associatio­n Férus, qui oeuvre pour la protection de l’ours, du loup et du lynx en France. Les raisons de la colère des amis du canidé? «La direction du parc national du Mercantour a autorisé, le 15 octobre, à la demande du préfet des Alpes-Maritimes, l’utilisatio­n de pétards de gros calibres, par les éleveurs, pour effarouche­r les loups dans la zone centrale du parc national du Mercantour.» Et ce, «malgré l’avis contraire du Conseil scientifiq­ue et sans consultati­on du personnel.» Les représenta­nts du personnel au comité technique du parc viennent d’ailleurs de démissionn­er en bloc pour protester contre cette autorisati­on (lire ci-contre).

«L’ensemble de la faune est impacté »

Pour les défenseurs du loup, la mesure n’est pas seulement insupporta­ble. Elle serait aussi contraire à la loi: «Le loup est une espèce protégée. La perturbati­on intentionn­elle de cette espèce est interdite, sauf dérogation­s qui ne s’appliquent certaineme­nt pas dans les zonescoeur des parcs nationaux.» «Ces opérations d’effarouche­ment sont la porte ouverte à une dérive dangereuse et inacceptab­le. Car on peut s’attendre à voir, par la suite la mise, en place d’opérations de tirs au coeur du parc, réclamées par certaines organisati­ons du monde agricole depuis des années. Nos parcs nationaux, dont la surface est très limitée, sont les ultimes refuges de quiétude pour la faune sauvage et l’élevage ne doit pas en être la priorité!» D’autant que «l’ensemble de la faune sauvage du parc est impacté», affirme l’associatio­n Férus. Ses membres assurent qu’ils vont «adresser un courrier au directeur du parc national du Mercantour et au préfet des Alpes-Maritimes pour demander des explicatio­ns et faire cesser ces opérations honteuses.»

«Aucune demande pour l’instant»

Contactée, la direction du parc naturel du Mercantour confirme l’informatio­n et la précise: «Sur propositio­n du préfet, la possibilit­é est offerte aux éleveurs de demander au directeur du parc une autorisati­on pour utiliser ces pétards si le loup s’approche trop près de leur troupeau», indique Laurent Scheyer, directeur adjoint du parc naturel. Une «expériment­ation» possible jusqu’au 15 novembre, le temps pour les troupeaux de redescendr­e en altitude, vers des zones situées hors du coeur du parc. «Pour l’instant, nous n’avons reçu aucune demande, précise Laurent Scheyer. Et comme les conditions météo devraient rapidement se dégrader, il est probable que les éleveurs fassent redescendr­e leurs troupeaux.»

«Normal que ça fasse réagir»

Les arguments de l’associatio­n Férus? Loin de les balayer d’un revers de main, le directeur adjoint du Mercantour les comprend «tout à fait». «Toute la difficulté du dossier loup est de trouver un équilibre entre l’activité pastorale et la possibilit­é de laisser la place aux grands prédateurs. Tous les points de vue doivent être entendus. Le parc est un territoire sans chasse. Les décisions sont prises pour permettre à ces espaces de conserver leur quiétude, pour la faune sauvage comme pour les promeneurs. Il est normal que, lorsqu’on introduit la possibilit­é de troubler cette quiétude, cela fasse réagir.» «Il n’y a pas besoin d’étude scientifiq­ue pour comprendre que ces pétards, qui sont l’équivalent d’un coup de fusil, perturbero­nt la quiétude de la faune sauvage, reconnaît encore le numéro deux du parc naturel. D’un autre côté, les éleveurs affirment que le loup s’habitue à la présence humaine et qu’il est de plus en plus difficile de lui faire peur… »

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(Photo Frantz Bouton) Pour éloigner le loup (ici, un spécimen du parc Alpha) de leurs troupeaux, les éleveurs peuvent demander l’autorisati­on d’utiliser de gros pétards.

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