Chantal Lauby raconte Gildas
Le journaliste emblématique des années Nulle part ailleurs sur Canal + s’est éteint dans la nuit de samedi à dimanche. Il avait 82 ans. Souvenirs de télévision, de Corse et d’éclats de rire…
La radio était sa vie. À égalité avec la télé. Point de salut hors des studios ou des plateaux, sinon dans le sud de la Corse où il s’était aventuré, marié, puis installé. C’est dans le golfe de Porto-Vecchio et nulle part ailleurs que, depuis les années quatre-vingt, Philippe Gildas cultivait son sens aigu de l’amitié. Ce corsaire du micro, passé de l’info au talk-show, s’amusait volontiers de son itinéraire de Breton contrarié, grand amoureux de la Méditerranée. De Belle-Île-en-Mer à l’Île de Beauté, un trait d’avion, d’humour, de plume. « Vous pouvez éteindre votre télévision. » Ainsi s’achevait l’almanach de Nos années Nulle part ailleurs, publié en 2014 chez Flammarion, dont Philippe Gildas était venu partager le souvenir des bons moments à Nice, où nous l’avions rencontré. Sans Maryse, sa muse. Mais la tête pleine de ses compagnons de route. Antoine de Caunes. La bande des Nuls : Alain Chabat, Dominique Farrugia et bien sûr Chantal Lauby, passée par Cannes avec le regretté Bruno Carette. Mais encore Didier l’Embrouille, OuinOuin, Pine d’Huître et la sublime Claudia Chiffon sous les traits passablement grimés de l’excellent José Garcia.
- : les années NPA
Ces années NPA constituaient « incontestablement le plus grand plaisir de (son) existence ». La petite fenêtre « en clair » étant «un coup de chance incroyable », puisqu’il s’agissait au tout début d’un exercice imposé. L’idée étant d’occuper une tranche non cryptée pour satisfaire « certains députés de gauche » qui ne supportaient pas qu’une chaîne soit payante. «Le clair, c’était notre punition!» , résumait Philippe Gildas. A l’arrivée : la possibilité d’inventer une nouvelle façon de faire de la télévision. Le duo De Caunes-Garcia, « un couple improbable, capable de tout », aura constitué dans cette décennie d’éclats de rire «une sorte d’apothéose ». Avec les Guignols dont se sont plaints quelques intéressés. Sagan qui ne supportait pas sa marionnette. Ou Johnny, «furieux » d’être représenté avec un si grand nez. « Ce qu’il n’a pas manqué de dire naïvement, comme l’enfant qu’il (était) resté», un jour où le rocker était de passage sur le plateau marbré de Canal. « Un seigneur des médias, un prince de l’amitié », a réagi hier Jean-Pierre Elkabbach, bouleversé. « Un modèle, un exemple pour toute une génération d’hommes et de femmes de notre profession », a salué Jean-Pierre Foucault. Philippe Gildas avait quatre-vingt-deux ans, il en paraissait quinze de moins et son humour en faisait un grand, un éternel adolescent.