Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Huit à vingt-cinq ans pour le guet-apens de l’ouest-Var

La cour d’assises a désigné deux meurtriers et deux complices dans le meurtre en bande organisée de Christophe Bourletsis à Pourcieux. La défense avait plaidé en choeur la relaxe faute de preuves

- G. D.

La cour d’assises du Var a délibéré quatre heures hier soir, dans l’affaire du guet-apens de l’ouest-Var, dans lequel Christophe Bourletsis a disparu le 2 juillet 2014. Elle en est ressortie avec quatre verdicts de culpabilit­é : deux meurtriers en bande organisée et deux complices. Alain Dinucci, qui semblait avoir un conflit majeur avec le disparu, a été condamné pour meurtre à vingt-cinq ans de réclusion. Pour meurtre aussi, Mourad Bouzidi, dans le garage duquel les faits s’étaient passés à Marseille, a été condamné à vingt ans. Christian Dinucci, père du premier, dont la complicité aurait consisté à se débarrasse­r du corps, a été condamné à quinze ans de réclusion. Enfin huit ans d’emprisonne­ment ont été infligés à Ahmed Cheref pour complicité de ce crime.

Un scénariste

À la reprise des débats, la parole avait été donnée à Me Alain Baduel, pour la défense de Christian Dinucci. La veille, la cour avait entendu les plaidoirie­s de Me Julien Pinelli pour Ahmed Cheref et Me Thierry Ospital pour Mourad Bouzidi. «La procédure est nourrie presque exclusivem­ent au début des éléments fournis par Mourad Bouzidi, a relevé Me Baduel. Il apparaît un peu comme le scénariste de ce dossier, où il distribue les rôles ou fait sortir des personnage­s. On ne peut s’arrêter à ses seules déclaratio­ns. » Il a mis en relief la fragilité de celles-ci quant au mobile que l’on pouvait prêter à Christian Dinucci. « Des machines à sous dont il serait propriétai­re? Il a été condamné à deux mois de prison avec sursis pour les avoir réparées. » Il ne croyait pas davantage à l’existence d’un document qu’aurait détenu Christophe Bourletsis, de nature à discrédite­r les Dinucci dans le milieu. « C’est sur les déclaratio­ns de cet homme qu’on vous propose de condamner Christian Dinucci ? Vous l’acquittere­z. » Dans les mêmes intérêts, Me Lionel Ferlaud a déploré le fait que les enquêteurs n’aient pas vérifié certains points, pour dénoncer «une enquête partiale ».

Un voyageur

Après le père, le fils. « Il n’y a pas d’élément objectif de la participat­ion d’Alain Dinucci, a plaidé Me Fabien Perez. Pas d’ADN. Il dit qu’à cette époque il est en Corse, où sa carte bancaire a été utilisée. » Dénonçant aussi les tâtonnemen­ts de l’enquête, s’agissant des quatre mobiles possibles, il a finalement dressé la liste des témoins que la cour n’avait pu entendre, soit qu’ils soient décédés, soit qu’ils ne soient pas venus à l’audience. Sa conclusion : « Je crois que c’est un rendez-vous pour une affaire de stupéfiant­s qui a mal tourné. Et je considère que l’avocat général ne vous a pas rapporté une preuve de la culpabilit­é d’Alain Dinucci. »

Mais pas de requins

« Dans un dossier où il n’y a pas de cadavre et pas de mobile », Me Eric Scalabrin estimait qu’on avait taillé aux Dinucci un costume trop grand pour eux. « Ce ne sont pas des requins. Dans la chaîne alimentair­e du banditisme, ils ne sont même pas au niveau du plancton. » Pour lui, le témoignage le plus important de l’affaire était celui de la compagne de Mourad Bouzidi. Elle avait observé, depuis sa fenêtre, le chargement du corps dans le coffre d’une voiture, et entendu un homme parler. « Elle a dit qu’il n’était pas gros, alors qu’Alain Dinucci est corpulent. Ca, c’est une preuve. » À tous ces questionne­ments, les jurés varois ont apporté leur réponse. Il est probable qu’elle sera frappée d’appel.

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(Croquis d’audience Rémi Kerfridin) En défense (de gauche à droite) Éric Scalabrin et Lionel Ferlaud. Mes Fabien Perez,

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