Les noms des radicalisés bientôt livrés aux maires
Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur, a annoncé avoir signé hier une circulaire leur permettant d’être informés en cas de présence d’un fiché S sur un « poste sensible »
Au 28 septembre, 20 459 personnes étaient inscrites au Fichier pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT). Hier matin, jour de commémoration des attentats du 13 novembre 2015 à Paris, le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, a annoncé sur BFMTV que leurs noms seront livrés aux maires. Le ministre a précisé avoir signé une circulaire qui permettra aux premiers magistrats d’être « systématiquement » informés en cas d’inscription à ce fichier d’un employé municipal occupant un poste sensible, y compris dans les crèches et l’éducation. Pour garantir la confidentialité des échanges, une charte sera signée entre le préfet, le maire et le procureur. Dans quel but ? Christophe Castaner a indiqué que les premiers magistrats pourront ainsi prendre des mesures de prévention pour déplacer l’agent – « qui n’a pas commis de faute », précise-t-il – « et éviter qu’il soit dans un poste exposé, à risques ».
Emmanuel Macron et Molins favorables
En mai dernier, Emmanuel Macron et le procureur de Paris, François Molins, s’étaient prononcés pour. Et ce, alors même que l’ex garde des Sceaux, Nicole Belloubet disait ne pas y être favorable. Christian Estrosi, maire de Nice, rappelant qu’il avait appelé la mesure de ses voeux en juillet dernier au nom des maires de la « France audacieuse », a salué l’initiative. « Depuis des années, les maires, par l’action de terrain de leurs différents services municipaux, faisaient remonter des informations capitales, de signaux de radicalisation d’individus, à la justice, aux services de l’État ou au préfet. Dès 2014, alors que nos signalements restaient sans réponse, j’avais mis en place dans ma ville une cellule d’écoute et d’action face aux dérives fondamentalistes. » De son côté, Eric Ciotti, député des Alpes-Maritimes, évoque une fausse bonne idée. « Cette mesure peut sembler aller dans le bon sens mais, en réalité, elle ne changera rien à la lutte contre le terrorisme islamiste si les maires n’ont aucun moyen d’action efficace. En effet, quelle action concrète une fois cette information communiquée aux maires ? (...) » Eric Ciotti propose l’expulsion « automatique » de tous les étrangers fichés pour radicalisation inscrits au FSPRT. «Parmi les 20 000 radicalisés suivis par nos services de renseignement, 3 391 sont de nationalité étrangère et 619 ont une double nationalité. Si Christophe Castaner veut lutter efficacement contre le terrorisme islamiste il doit expulser tous les étrangers radicalisés fichés au FSPRT. » Le maire de Cannes, David Lisnard, voit un avantage à la mesure. « Cela peut éviter de favoriser l’entrisme associatif, ou dans la cité, de certains éléments radicalisés qui sous couvert d’actions caritatives essayent de s’implanter. Mais c’est assez marginal.» Ily voit par ailleurs un inconvénient. «On ne peut invoquer officiellement qu’une personne soit fichée S pour l’éloigner ou la licencier. » Le maire de Grasse, Jérôme Viaud, se dit favorable. «. Cette circulaire répond à une attente que je formule depuis des mois. (...) Ces informations viendront renforcer, les actions au niveau local de la cellule municipale d’échange sur la radicalisation, (CMER), qui associe les représentants de l’État, police nationale, municipale, renseignements territoriaux, destinés à prévenir tous les phénomènes liés à la radicalisation. »