Vers une paralysie nationale?
Vont-ils paralyser la France ? Pris de vitesse par ce mouvement de défiance qui a essaimé en quelques semaines sur les réseaux sociaux, hors de tout cadre syndical ou politique, l’exécutif a tenté de le désamorcer. « Que nos concitoyens, qui considèrent qu’aujourd’hui ils ne sont pas entendus, pas considérés, s’expriment et le disent : il faut le respecter, il faut l’entendre », a affirmé mercredi le président Emmanuel Macron, tout en disant « sa méfiance » face aux récupérations politiques. Le Premier ministre Édouard Philippe a annoncé des mesures « d’accompagnement » pour atténuer la hausse des prix de l’énergie, tandis que le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner a, lui, joué la fermeté en assurant qu’aucun « blocage total » ne sera toléré.
L’action du gouvernement sans effet
Sans effet pour le moment : environ 1 500 actions sont attendues sur l’ensemble du pays et seulement « un peu plus d’une centaine » auraient été déclarées, selon une source policière. Elles viseront à perturber ou bloquer les accès aux villes, les rocades et grands axes routiers (péages d’autoroutes, tunnels du Mont-Blanc et du Fréjus...), aéroports (Marseille, Bordeaux, Toulouse, Beauvais...) ou dépôts et raffineries de carburants (Donges, Fossur-Mer, Feyzin...). Une opération escargot doit également se déployer sur le périphérique parisien avant de rejoindre l’Elysée. « On ne pense pas aux gens qui sont en périphérie, en province, en zone rurale (...). On leur dit de se déplacer autrement mais la réalité, c’est pas ça. Ils n’ont pas d’autre choix que de payer », explique Priscillia Ludosky, à l’origine d’une pétition pour une baisse des prix à la pompe qui avait recueilli, hier, plus de 850 000 signatures. Au fil du temps, l’opposition à la hausse des prix du carburant, première des revendications, s’est élargie à une contestation plus large de la politique du gouvernement et notamment des taxes qui grèvent le pouvoir d’achat. « Il va falloir aller se battre le 17 novembre pour que nous, citoyens, on ait notre mot à dire dans l’avenir sur ce qui va se passer en France : les taxes, les lois, la gestion du gouvernement », affirmait cette semaine sur Facebook Éric Drouet, chauffeur routier à l’origine de la mobilisation. L’appel à un « blocage national contre la hausse du carburant » qu’il a lancé en octobre sur Facebook a été décliné en autant de groupes locaux, et les gilets jaunes fluo de sécurité routière ont fleuri sous les parebrise en signe de ralliement à ce mouvement protéiforme. L’ampleur soudaine prise par cette fronde, qui rappelle les « bonnets rouges » contre l’écotaxe en 2013, a déconcerté. « Même si [ce mouvement] est irrationnel, c’est réel » ,areconnu Christophe Castaner. S’il a réaffirmé « la liberté de manifester », le gouvernement a également multiplié les mises en garde. « La loi s’appliquera », a assuré Édouard Philippe et les forces de l’ordre interviendront pour lever les blocages, a prévenu M. Castaner, exhortant les organisateurs à la « responsabilité ». « Trente unités de forces mobiles (environ 3 000 hommes, Ndlr) sont mises à disposition des préfets pour intervenir en renfort des effectifs normaux de police et de gendarmerie », a précisé le ministère de l’Intérieur.