« l’état d’urgence social »
Péage de Bandol : le compte n’y est pas
Attendu au tournant après dix jours d’un trop long silence, Emmanuel Macron a visiblement raté son oral de rattrapage. Il n’a pas su convaincre. C’est du moins le sentiment général qui ressortait hier soir chez les Gilets jaunes qui occupent le péage de Bandol depuis le 17 novembre dernier. Attentifs au discours du chef de l’État diffusé sur une petite tablette, les Gilets jaunes n’ont pas entendu les mesures qu’ils espéraient. Ils n’ont pas cru non plus à la sincérité du Président. « Y’a rien dans son discours. Il a dû prendre des cours de comédie. Tout ce qu’il fait, il le fait payer par les autres. Surtout pas en annonçant une réduction des dépenses de l’État », lâche Bernadette, à peine l’intervention télévisée terminée. Déçue? « Même pas. Je ne m’attendais à rien », confie cette retraitée qui affirme ne toucher que 950 € de pension par mois.
« Il essaie de nous rouler dans la farine »
Elischeba (un pseudonyme) est sur la même longueur
d’onde. « Le Président a beaucoup donné dans le mélodrame. Il essaye de nous rouler dans la farine. Encore une fois, il n’a pas su se mettre à la portée du commun des mortels, mais reste dans sa bulle », glisse cette femme, qui aurait bien aimé un geste en faveur de ceux qui perçoivent une pension d’invalidité. Rien dans le discours d’Emmanuel Macron ne semble trouver grâce à ses yeux. La hausse
du Smic de 100 € dès janvier prochain ? « On ne sait pas si c’est en brut ou en net. » Les retraites ? « Il a à peine effleuré le sujet. » Annonçant d’ores et déjà son intention de rester mobilisée samedi prochain, Elischeba enfonce le clou : « Emmanuel Macron est en total décalage avec nous. » La preuve ? « Il s’en est pris à l’APL (aide personnalisée au logement, Ndlr), mais on ne l’a pas entendu annoncer son intention de remettre en question le salaire à vie perçu par les anciens présidents de la République ». Jardinier de métier, Nicolas est persuadé que « la mobilisation ne baissera pas le week-end prochain». Lui continuera à venir au péage de Bandol, « parce qu’avec un salaire de 1 500 € , une fois qu’on a payé ses obligations, il faut jongler pour s’en sortir », explique-t-il. D’une voix calme, posée, Sébastien est celui qui va le plus loin dans la critique. « Il y a un décalage entre le discours présidentiel et la réalité que vivent les gens, leurs besoins. Qu’Emmanuel Macron assume la catastrophe dans laquelle il nous a mis. Et la seule façon d’assumer est de démissionner, lui et son gouvernement. Il n’y a pas de confiance entre lui et le peuple, c’est trop tard », assène cet acheteur industriel qui, plutôt que de voir augmenter le Smic, aurait préféré que le chef de l’État s’attaque au coût de la vie et annonce des mesures susceptibles de faire baisser les loyers, les carburants… Moins radical, Fabian, qui n’a pas écouté le discours en direct, est conscient du manque de structuration des Gilets jaunes et de la trop grande variété des revendications. Pour y remédier, il attend qu’Emmanuel Macron inscrive le référendum d’initiative citoyenne dans la constitution. « La seule façon pour que les citoyens retrouvent du pouvoir ».