Guillaume Peltier: «Il nous faut développer l’Afrique»
Le 1er vice-président de LR regrette la validation par la France du Pacte sur les migrations de l’ONU. Lui propose un « Plan Marshall » de codéveloppement pour aider les Africains à ne plus migrer
Premier vice-président des Républicains et député du Loir-et-Cher, Guillaume Peltier s’émeut de l’approbation par la France du Pacte mondial sur les migrations de Marrakech. Il y voit une menace potentielle sur notre souveraineté. Et propose un « Plan Marshall pour l’Afrique », qui vise à renverser les priorités, en aidant les Africains à se fixer chez eux.
Qu’est-ce qui vous heurte dans le Pacte de Marrakech ?
Je regrette que la France s’apprête à signer (le décembre) ce Pacte qui est, de l’avis de nombreux Etats, un symbole d’aveuglement et de laxisme sur l’immigration. Des pays comme les Etats-Unis, l’Australie, la République tchèque ou l’Autriche refusent, eux, de le signer. Pour une raison simple : en pages et objectifs, ce Pacte s’en prend à la souveraineté des Etats et à leur indispensable capacité à gérer les flux migratoires.
De quelle façon ?
Trois exemples. Un, le Pacte reconnaît un droit fondamental à la migration. Deux, il recommande un accès immédiat aux prestations sociales pour les étrangers. Trois, il incite à la promotion du multiculturalisme, à travers le devoir de respecter les coutumes des migrants. Avec un préambule inquiétant qui dit « qu’à l’heure de la mondialisation, les migrations sont un facteur de prospérité, d’innovation et de développement durable ». C’est donc une folie de signer ce Pacte, plus encore à l’heure où la paix civile est menacée chez nous et où une écrasante majorité demande au gouvernement de se préoccuper des intérêts de notre pays. Soixante-dix ans après la Déclaration universelle des droits de l’homme, il est dangereux d’oublier le droit primordial de chaque peuple à décider souverainement qui il veut accueillir et à ne pas subir de migrations forcées.
Mais ce Pacte n’aura pas de valeur coercitive…
Il est officiellement non contraignant. Mais l’histoire a montré que les pactes signés au niveau international, même quand ils n’étaient que symboliques, ont entraîné des évolutions législatives. Derrière ce symbole, se cache une volonté de suspendre la volonté des Etats en matière d’immigration.
Quelles sont vos propositions ?
Nous demandons au Président de ne pas signer ce Pacte dangereux et de convoquer un sommet mondial à Paris pour régler les questions des migrations et du codéveloppement, avec tous nos partenaires européens, africains et du Proche-Orient. Autour d’une idée simple : s’attaquer à la cause de l’immigration, la misère des pays du sud. Il y aura , milliards d’Africains en . Aucun pacte, aucune loi ne pourra traiter cette question sans s’attacher au codéveloppement. Comme l’a proposé Nicolas Sarkozy, comme le met en partie en oeuvre Jean-Louis Borloo avec son plan d’électrification, je souhaite que tous les moyens financiers actuellement distribués par l’Europe à l’Afrique soient remis à plat. En partant d’un principe simple, continuer à aider l’Afrique, en échange de contreparties ciblées : le contrôle des frontières, la création d’administrations d’état-civil et de vrais projets nationaux et locaux de développement. Plutôt que de distribuer aveuglément l’argent européen à des gouvernements qui l’utilisent fort mal, nous devons créer des partenariats entre entreprises européennes et africaines, comme le font les Chinois et les Américains, pour implanter des systèmes d’irrigation, anticiper l’aide alimentaire, bâtir des réseaux d’éducation… Si Emmanuel Macron avait l’audace de prendre ce leadership, de faire de l’immigration une priorité à travers le codéveloppement pour permettre aux peuples africains de rester en Afrique, on réglerait en grande partie le phénomène dévastateur, pour les Africains en particulier, des migrations forcées. Il est rare qu’un Africain émigre de son plein gré. Actuellement, le pouvoir gère les conséquences sans s’attaquer aux causes. La France a ainsi donné ces dernières années au Mali millions d’aide au développement, sans aucune contrepartie, sans même que le Mali n’accepte le retour de ses clandestins, onze d’entre eux exceptés. Le codéveloppement doit être fondé sur du donnant-donnant et des engagements fermes de maîtrise migratoire. Il nous faut développer l’Afrique pour les Africains. Les Chinois l’ont bien compris, qui ont sur le sol africain entreprises qui participent au développement. Le défi du XXIe siècle et de régler la question migratoire aux racines du problème.
La volonté d’aider l’Afrique chez elle existe depuis des années. Pourquoi n’a-t-elle pas porté ses fruits jusqu’ici ?
Il existe un aveuglement européen. Macron, par exemple, veut que l’Europe soit unie pour mieux répartir les migrants en son sein. Il y a une alliance de fait entre les hauts fonctionnaires et certaines grandes multinationales, qui voient dans l’immigration une possibilité de tirer les salaires vers le bas. Je souhaite que la France prépare le plus grand Plan Marshall de l’histoire entre l’Europe et l’Afrique. L’argent existe, il est déjà distribué. Je propose qu’il le soit à l’avenir avec des contreparties très strictes, afin qu’il aille vraiment aux Africains et au développement de l’Afrique. Cette coopération pourrait même être augmentée par une taxe sur les transactions financières.
Les aides actuelles sont-elles régulièrement dévoyées ?
Il y a trop d’opacité dans l’utilisation des fonds. Un seul pays, le Cap-Vert, a accepté des contreparties sur la gestion de ses flux migratoires. L’argent va trop souvent aux Etats, sans contrôle. Chinois et Américains ont trouvé la parade : ils ne financent plus les Etats mais des projets portés par des entreprises. Je voudrais des partenariats à - entre des entreprises africaines et européennes. Rien ne réglera le sort des , milliards d’Africains en , sans la possibilité pour eux de grandir et de bâtir chez eux. Aujourd’hui, nous sommes trop généreux en Europe et trop inattentifs en Afrique. Je suggère tout l’inverse : qu’on soit ferme pour défendre nos valeurs en Europe, mais bien plus généreux en Afrique, directement avec les Africains.