Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Philippe Da Silva, le magicien de Pennafort

Le chef étoilé fête cinquante ans de métier, dont la moitié à l’Hostelleri­e de Callas. Derrière le profession­nel reconnu, se cache un homme animé par l’envie de faire le bonheur des autres

- V. G. vgeorges@nicematin.fr

Les yeux pétillent, le sourire est spontané. Philippe Da Silva ne fait pas semblant, il aime son prochain et l’accueille avec chaleur. À presque 65 ans, le chef étoilé de l’Hostelleri­e Les Gorges de Pennafort, à Callas, fête un demi-siècle de métier, dont la moitié à la tête de cet hôtel-restaurant qui lui vaut d’être connu dans le monde entier. Pour fêter cet anniversai­re, il reçoit aujourd’hui 140 personnes. Et appréhende ce moment sans stress : « Ça permet de réunir des clients, des gens qu’on aime bien. Ça va être une belle fête » dit-il, avec naturel. La grosse tête, ce n’est pas pour lui. Pourtant, le chemin parcouru par ce petit Portugais, né dans l’Algarve et arrivé en France au tout début des années soixante, aurait de quoi lui faire enfler les chevilles.

Simplicité, spontanéit­é, générosité

Trois mots peuvent le qualifier : simplicité, spontanéit­é, générosité. « Ma grand-mère et ma mère cuisinaien­t bien ; Des ragoûts, des plats simples mais bons, racontet-il. Moi, je me faisais mes oeufs au plat avec de l’huile d’olive. Je suis venu au beurre plus tard, c’est meilleur d’ailleurs. ». Philippe Da Silva convient luimême de sa gourmandis­e: « J’aime tout, salé, sucré… Quand c’est bien fait, c’est bon ». Autant en faire son métier… Il commence à 14 ans (au Galoubet, à Port-Grimaud) puis, son CAP en poche, rejoint Claude Girard (les Santons, à Grimaud). Mais « pour réussir, il fallait aller à Paris ». Ce qu’il fait à 20 ans : chez Julius à Gennevilli­ers, il rencontre Jean-Michel Bédier. Il le retrouve en 1976 au Chiberta, qui décroche en 1987 deux étoiles au guide Michelin. Pendant une vingtaine d’années, il va côtoyer le gratin : têtes couronnées, hommes et femmes politiques, artistes, sportifs, etc. « Obama m’a impression­né. Je l’ai rencontré la première fois lorsqu’il était avocat. Il écoutait les gens parler. Son allure, sympa, cool, m’a interpellé. Mitterrand était impression­nant, il savait se mettre au niveau de tout le monde. Hollande, je ne l’appréciais pas au départ, mais quand on le connaît, c’est quelqu’un de très marrant, de sympathiqu­e ». Une autre rencontre, féminine, va bouleverse­r Philippe Da Silva : Martine, devenue son épouse, est Varoise. Elle n’a rien à voir avec la restaurati­on, mais c’est ensemble qu’ils retrouvent le Var en relevant le défi proposé par la famille Garrassin : reprendre l’hostelleri­e en 1995. Dès l’année suivante, une étoile couronne le travail d’un chef passionné et de sa brigade. Aujourd’hui, cette table d’excellence, où l’on privilégie les meilleurs produits locaux, est très courue. On y vient du bout du monde pour le contenu de l’assiette, d’une générosité légendaire, mais surtout pour la personnali­té attachante du maître queux. Carré en cuisine, il privilégie de plus en plus le dialogue. Et « aime transmettr­e le goût, le métier, ce qu’on sait faire, ce qu’on a appris. Cela permet aux autres d’évoluer, de faire mieux ».

Un sensible au coeur d’or

Derrière le profession­nel reconnu se cache un homme sensible au coeur d’or. « Je pars du principe qu’on gagne plus à être gentil, souriant, avenant, qu’à être méchant. Il faut respecter l’autre. Je préfère donner de l’amour que de la méchanceté » explique-t-il en déplorant « l’agressivit­é, le manque de respect et d’éducation qu’on voit aujourd’hui ». Si certaines violences commises par des gilets jaunes lui font « un peu peur » , il répète « il y a des gens dans le besoin, il faut les aider ». Touché par toutes les formes de détresse, il multiplie les actions généreuses : repas pour de bonnes causes et dons aux associatio­ns (Resto du coeur, enfants malades, familles des sapeurs-pompiers décédés…). Cet amateur de sport automobile n’aime pas trop regarder dans le rétroviseu­r. Mais s’il devait revivre les 50 années écoulées « je referais pareil ». Pour lui, le meilleur moment est toujours « le jour d’après ». D’ailleurs, il ne compte pas prendre sa retraite. « J’ai toujours envie de travailler. Quand on part le matin, avec l’envie d’y aller, ce n’est pas du travail » assure-t-il. Bon anniversai­re Monsieur Da Silva !

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(Photos Dylan Meiffret) Les nouvelles cuisines, équipées de matériel haut de gamme, permettent au chef étoilé et à toute la brigade de travailler dans les meilleures conditions.
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Avec son épouse Martine, à laquelle il rend hommage : elle, l’aventure n’aurait pas réussi ». « Sans
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« Sans une équipe, on ne peut rien faire », souligne Philippe Da Silva, entouré ici de son chef Anthony Sallièges (à droite) et d’une partie de la brigade et du personnel de salle.

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