L. Wauquiez : « La colère est sur le pouvoir d’achat »
En déplacement aujourd’hui dans le Var, le patron des Républicains invite à un référendum qui réponde aux « vraies attentes des Français », la baisse des impôts et la valorisation du travail
Laurent Wauquiez s’est lancé dans un Tour de France d’une dizaine de jours, qui passe ce jeudi par La Garde dans le Var. A son programme, une visite du Crossmed, le centre de surveillance et de sauvetage en Méditerranée, puis une série de rencontres dans le quartier Romain-Rolland, avant une réunion publique à 19 h salle Gérard-Philipe. Fidèle à sa ligne d’une droite cash, le président de LR est à l’offensive contre le gouvernement.
Vous craignez que le Grand Débat vire à la supercherie. Mais vous imitez Emmanuel Macron en sillonnant la France…
Ma démarche est complètement différente. Je vais rencontrer directement les Français là où ils vivent et où ils travaillent. Je n’organise pas des mises en scène dans des salles polyvalentes. J’ai discuté avec des médecins et des infirmières dans un hôpital, j’ai vu des entrepreneurs et des artisans, je vais échanger avec les forces de police dans le Var… Je veux que les Français puissent m’expliquer leurs difficultés au quotidien et leurs attentes.
Le choix de François-Xavier Bellamy comme tête de liste LR ne fait pas l’unanimité au sein de votre parti. Pourquoi lui ?
C’est un choix qui a été validé par trente-huit élus sur quarante. Je l’ai choisi, d’abord, parce que c’est un nouveau visage et qu’on en a besoin. Je l’ai choisi, ensuite, parce que c’est un philosophe, un sage, qui remet de la hauteur de vue dans le paysage politique. Je l’ai choisi, enfin, parce que je veux reconstruire une droite qui assume ses idées et arrête de s’excuser de ce en quoi elle croit.
Vous donnez toutefois du grain à moudre à ceux qui vous accusent de rabougrir la droite et de courir après l’extrême droite…
Non, ça n’a rien à voir. FrançoisXavier Bellamy représente la droite des valeurs. Agnès Evren (n° sur la liste) est une jeune femme qui a créé son entreprise, élue en Ile-de-France, et Arnaud Danjean (n° ) est un spécialiste de la lutte contre le terrorisme. Au contraire, avec ce trio, on rassemble toute la droite. Notre liste sera la seule qui permettra de dire oui à l’Europe et non à Emmanuel Macron (). Quand on voit aujourd’hui les dégâts de la sortie de l’Europe au Royaume-Uni, on mesure à quel point les propositions de Marine Le Pen et Nicolas Dupont-Aignan sur l’Europe sont de la folie pour la France.
Votre sentiment sur le veto de l’Union européenne à la fusion entre Alstom et Siemens ?
Toute cette histoire est un gigantesque fiasco, dans lequel Emmanuel Macron porte une très lourde responsabilité. Comme ministre de l’Economie de François Hollande, c’est lui qui a vendu Alstom à la découpe à General Electric, qui aujourd’hui ne tient pas parole et détruit des emplois, contrairement aux engagements pris. Il a ensuite poussé ce projet de fusion Alstom - Siemens qui débouche sur un échec dramatique, sans doute le plus gros échec industriel pour la France depuis longtemps. C’est révélateur pour moi d’un président de la République qui ne défend pas assez nos entreprises.
Si référendum il y a, couplé aux européennes, quelles questions devra-t-il contenir à votre goût ?
Ma crainte est que soient posées des questions n’ayant rien à voir avec les attentes des Français. On est en train de nous expliquer que la grande attente de nos concitoyens serait de voir changer les règles électorales. C’est prendre les gens pour des imbéciles ! Les Français ont exprimé leur colère sur le pouvoir d’achat et les impôts. Prenons l’exemple des retraités. Plus personne n’en parle, alors que le sujet n’est en rien réglé. La pause sur la CSG n’est que temporaire et une partie des retraités continue à la payer. Je n’accepterai pas que, dans un pays comme la France, le chef de l’Etat refuse de revaloriser les retraites au moins du niveau de l’inflation. Nous sommes donc favorables à un référendum, mais sur de vraies questions, pas pour savoir si les Français veulent la proportionnelle pour modifier les institutions à la marge. Les vraies questions, ce sont les retraités, les impôts, les classes moyennes, la valorisation de ceux qui bossent par rapport à l’assistanat.
Que proposez-vous en faveur du pouvoir d’achat des actifs ?
Pa exemple, on voudrait que le gouvernement s’engage dans un plan de lutte contre le gaspillage de l’argent public, avec en parallèle un plan de baisse des impôts, en particulier de l’impôt sur le revenu. On voudrait aussi voir évoluer notre système de solidarité pour qu’en contrepartie du RSA soient demandées des heures de travail d’intérêt général. Quand il y a des droits, il doit y avoir des devoirs. Je ne veux pas que l’on sorte du Grand Débat en cachant la poussière sous le tapis et en n’abordant pas les véritables problèmes du pays.
A travers sa volonté de raboter les niches fiscales, considérezvous, comme Eric Ciotti, que Gérald Darmanin « est le père fouettard des classes moyennes »
Eric Ciotti l’a très bien dénoncé. Supprimer des niches fiscales, en réalité, c’est un autre nom pour augmenter les impôts. Comme toujours dans notre pays, on commence par nous dire qu’on va faire payer les plus riches mais, à l’arrivée, ce seront les classes moyennes qui paieront. Ce dont il est question, c’est de supprimer ou de limiter les aides pour les emplois à domicile, les gardes à la maison. On s’opposera à cette mesure. Le gouvernement, parce qu’il a mal géré le budget et qu’il est aux abois, cherche par tous les moyens à créer de nouveaux impôts pour faire la poche des Français. Je lui suggère plutôt de trouver les moyens de réaliser de vraies économies sur le train de vie de l’Etat.
Vous ne remettez pas en cause, en revanche, le quasi-abandon de l’ISF, conforme à vos valeurs ?
Non, parce que le problème n’est pas d’augmenter les impôts mais de les baisser sur les classes moyennes. L’injustice est d’avoir baissé l’ISF en augmentant la CSG et en ne faisant rien sur l’impôt sur le revenu. Ce que nous réclamons, c’est un réel plan d’économies qui rende l’argent économisé aux Français, sous la forme d’une baisse des impôts.
Contrairement à Christian Estrosi, vous vous opposez au retour des djihadistes français. Quelles sont vos raisons ?
Je ne comprends pas la position de Christian Estrosi. Je le répète avec la plus grande fermeté, les djihadistes partis en Syrie ne doivent pas revenir en France. Ce sont des barbares, on a affaire aux figures les plus criminelles de Daesh. Je me suis rendu en Irak, en soutien aux minorités chrétiennes, et j’ai vu ce qu’ils avaient fait là-bas. Il est vraiment incompréhensible qu’Emmanuel Macron accepte que ces djihadistes reviennent. Il nous dit que ce sont d’abord des Français… Non, ce sont d’abord des barbares ! Le Royaume-Uni leur a enlevé leurs passeports, d’autres pays européens ont veillé à ce qu’ils soient jugés en Irak et en Syrie. Ma priorité est la sécurité des Français, donc que les djihadistes ne reviennent pas.
Vous devez être satisfait, en revanche, du vote par l’Assemblée du texte anti-casseurs, largement inspiré par Les Républicains ?
Oui, c’est en effet un texte qui émane des Républicains. Pendant longtemps, la majorité a refusé de le voter, mais elle a fini par changer d’avis, même si une partie s’y est refusée. Il est indispensable d’apporter notre soutien aux forces de l’ordre. Nous ne pouvons pas accepter que l’on s’exprime en cassant. Mais je souhaite que l’on puisse aller encore plus loin en instaurant des peines planchers pour ceux qui attaquent des pompiers, des gendarmes ou des policiers. Charles Pasqua le disait très bien, il faut que la peur change de camp. Or, aujourd’hui, on a le sentiment que les délinquants n’ont pas peur. Et c’est toujours dangereux pour le respect des valeurs républicaines.
Les cités semblent les grandes absentes de l’agitation actuelle. Comment l’expliquez-vous ?
Pendant que la France a été obsédée par les « gilets jaunes », je redoute que les réseaux intégristes et de trafic de drogue n’aient continué à prospérer. Prenons garde à ce qu’une autre crise ne couve pas derrière la première. C’est pour cela que je vais me rendre dans un commissariat et que j’apporte mon soutien à l’excellent travail effectué par Hubert Falco dans la métropole toulonnaise. Il faut que nous soyons vigilants sur ce qu’il se passe à bas bruit dans nos quartiers. Je suis un fervent partisan de l’intégration à la française : quand on vit en France, on adopte le mode de vie des Français et on devient français.
On prend les gens pour des imbéciles” Les djihadistes sont d’abord des barbares”
Si Eric Ciotti, président de la fédération LR des AlpesMaritimes, se porte candidat aux municipales à Nice contre Christian Estrosi, maire sortant LR lui aussi, sur quels critères sera attribuée l’investiture du parti ?
Pour l’instant, les Français n’ont pas la tête aux municipales, ils veulent juste qu’on s’occupe de leurs problèmes. La seule chose que je dirai est qu’Eric Ciotti fait un remarquable travail dans cette fédération des Alpes-Maritimes, devenue la première de France en nombre d’adhérents. Et il a deux qualités que j’apprécie énormément : c’est un excellent gestionnaire, qui au Département des Alpes-Maritimes a su baisser la dette et les impôts. Et c’est quelqu’un qui manifeste une vraie droiture et une vraie constance. 1. C’est également le slogan de Jean-Christophe Lagarde, tête de liste de l’UDI.