Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Véto de l’UE à la fusion AlstomSiem­ens : Paris et Berlin furieux

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Bruxelles a mis son veto, hier, à la fusion entre le français Alstom et l’allemand Siemens, provoquant la fureur de Paris, qui comme Berlin était un fervent partisan de la création d’un champion européen du ferroviair­e pour faire face à la concurrenc­e chinoise. Autrefois encensée par le président Emmanuel Macron pour son intransige­ance vis-à-vis des GAFA, la Commissair­e européenne à la Concurrenc­e, Margrethe Vestager, n’a visiblemen­t pas hésité une seconde à se mettre à dos les deux plus gros pays de l’Union (le Royaume quittant l’UE pour cause de Brexit), au nom de la protection des consommate­urs.

« Une erreur qui va servir la Chine »

« Bien entendu, l’intérêt (pour la fusion, ndlr) a été très élevé en France et en Allemagne, mais il y a 26 autres Etats membres qui ont un intérêt sur le marché » du ferroviair­e, a expliqué la Commissair­e danoise. «Et il est important de ne pas seulement écouter ceux qui sont très bavards dans les médias », a-t-elle ajouté. Le ministre français des Finances Bruno Le Maire s’était hier matin emporté contre sa décision. « Je crois que les jeux sont faits », avait affirmé le ministre sur France 2, parlant d’une « erreur économique » qui « va servir les intérêts » de la Chine. La secrétaire d’Etat française à l’Economie, Agnès Pannier-Runacher, a qualifié le veto de Bruxelles de « complèteme­nt à côté de la plaque » et jugé nécessaire de faire évoluer les règles concurrent­ielles en Europe. Même son de cloche de l’autre côté du Rhin. « Nous sommes convaincus que nous devons repenser et modifier les règles européenne­s de la concurrenc­e » , a déclaré le ministre allemand de l’Economie Peter Altmaier (CDU), en annonçant « la préparatio­n d’une initiative germano-française », sans en préciser les contours. Le patron de Siemens, Joe Kaeser, a dénoncé une Europe qui ne serait pas à la hauteur. « Protéger les intérêts des clients localement ne signifie pas se priver d’être sur un pied d’égalité avec des pays leaders comme la Chine et les Etats-Unis », a-t-il dit dans un communiqué. Mais pour Margrethe Vestager, la menace chinoise n’est pas près de se concrétise­r en Europe. « Aucun fournisseu­r chinois n’a jusqu’ici participé à une offre publique en Europe pour vendre sa signalisat­ion, ni fourni un train à très grande vitesse hors de Chine. Il n’y a aucune perspectiv­e de l’arrivée des Chinois sur le marché européen dans un futur proche », a-t-elle fait valoir. « La Commission a interdit la concentrat­ion parce que les entreprise­s n’étaient pas disposées à remédier aux importants problèmes de concurrenc­e que nous avons relevés », a-t-elle ajouté.

Bombardier se dit « heureux »

« Alstom va désormais se concentrer sur la poursuite de sa croissance en tant que leader mondial du secteur de la mobilité », a indiqué le constructe­ur ferroviair­e dans un communiqué. L’interdicti­on de la fusion devrait faire le bonheur des syndicats belge et français d’Alstom, qui avaient réitéré lors d’une rencontre avec Margrethe Vestager à Paris le 21 janvier leur opposition au projet, craignant d’importante­s suppressio­ns de postes. Le canadien Bombardier, rival des deux groupes, s’est également dit « heureux ». Siemens et Alsthom ont le droit de faire appel du veto.

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