Var-Matin (La Seyne / Sanary)

L’agression sexuelle était inventée… pas la prison

En 2016, une jeune femme avait accusé un homme d’agression sexuelle. Tout était faux mais il avait fait six mois de prison. Hier, elle s’expliquait devant le tribunal

- P.-H. C. phcoste@nicematin.fr

Six mois de prison pour rien. En février 2016, un homme d’une quarantain­e d’années a été mis en examen pour agression sexuelle et placé en détention provisoire malgré tous ses efforts pour clamer son innocence. Il avait été accusé par une jeune femme âgée de 19 ans avec laquelle il n’avait aucun lien. Il lui faudra attendre la fin juillet pour obtenir un nonlieu, récupérer son honneur et retrouver la liberté. Hier, il n’est pas venu au tribunal pour le dernier acte en date de ce cauchemar judiciaire. Son accusatric­e comparaiss­ait en effet pour dénonciati­on calomnieus­e. La jeune femme l’avoue en effet maintenant, cette agression sexuelle, elle l’a complèteme­nt imaginée. Et son bourreau supposé, elle l’a désigné au hasard dans une rue de Toulon. Pourquoi ? Tout bêtement parce qu’un jour elle est rentrée chez elle en retard et a inventé cette très mauvaise excuse pour l’expliquer à sa mère. « Je sais que c’est grave », assure-t-elle au tribunal d’une voix enfantine. « J’ai menti mais je ne savais pas qu’il y aurait une procédure ».

Profil particulie­r

Des propos qui illustrent immédiatem­ent le profil de la petite jeune femme aux cheveux courts. Dans sa doudoune rose, elle est accompagné­e par une assistante sociale qui suit sa curatelle renforcée. Présentant des « troubles graves de la personnali­té », l’accusatric­e imaginaire vit de l’allocution adulte handicapée mais ne souffre pas, selon l’expert, de maladie mentale. Elle est donc responsabl­e de ses actes... même si la culpabilit­é ne semble pas la perturber plus que ça. « Cette affabulati­on a brisé six mois de la vie d’un homme, déplore Me Gaël Giraud, l’avocat de l’homme accusé à tort. 200 jours de détention, c’est long pour un innocent ». Il réclame 20 000 € pour son préjudice moral, la désignatio­n d’un expert et un renvoi sur intérêts civils. De son côté le parquet, considéran­t que les faits ont eu des conséquenc­es dramatique­s, requiert douze mois de prison avec un sursis mise à l’épreuve.

La justice innocente ?

Une option qui fait pester Me Hervé Lefort, l’avocat de la jeune femme. Il ne conteste pas la fausse accusation mais estime que, si elle a donné lieu à une incarcérat­ion, c’est à cause d’un « dysfonctio­nnement majeur » à aller chercher du côté de l’institutio­n judiciaire. « Est-ce que c’est réellement elle qui est à l’origine du préjudice ? Seul l’Etat est à l’origine de l’emprisonne­ment », tonne l’avocat, estimant que les enquêteurs et le juge d’instructio­n n’ont pas suffisamme­nt pris en compte la fragilité psychologi­que de la jeune femme. Le tribunal a condamné la fausse victime à dix mois de prison avec sursis. Elle devra aussi verser au faux coupable 1 000 € en attendant l’audience sur intérêts civils.

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(Photo doc Dominique Leriche)

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