Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Le loup encore en cause

Anaïs Féménia est bergère au Cannet. Une zone jusqu’à présent préservée du loup. Pourtant, vendredi matin, la jeune femme a eu une très mauvaise surprise en rejoignant son troupeau

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Anaïs Féménia a 23 ans. Il y a un an, elle s’est installée comme bergère. Comme ses parents avant elle. Ce métier, elle l’a dans le sang et met toutes ses forces dans la réussite de son projet. Mais hier, à la Grande bastide, c’est la désolation. La jeune femme peine à retenir les tremblemen­ts dans sa voix quand elle raconte le massacre dont ses bêtes ont été victimes. « Vendredi matin, quand je suis arrivée à l’enclos où j’avais laissé mes bêtes, j’ai tout de suite senti qu’il y avait un problème. Les moutons étaient tous regroupés, “moulonnés” comme on dit. Quand ils m’ont vue, ils m’ont paru soulagés et se sont allongés. C’est à ce moment-là que j’ai découvert la première brebis. Entièremen­t dévorée, comme si elle avait été dépecée avec un couteau. Puis, en évoluant dans l’enclos, j’ai trouvé les autres victimes. Heureuseme­nt j’avais mis dix filets pour leur faire un parc assez large. Sinon, elles auraient paniqué et se seraient échappées. »

« Ici on connaît le renard, pas le loup »

En tout, sept bêtes ont été tuées. Une vingtaine d’autres blessées. «Jenepeux pas les soigner, je vais devoir les euthanasie­r » ,sedésole la bergère, qui n’a aucun doute sur l’identité du coupable. « L’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) est venu. Ils ont tout de suite confirmé que le troupeau a été attaqué par le loup Personnell­ement, je pense qu’ils devaient être plusieurs, vu les dégâts. » C’est la stupeur pour Anaïs. « J’ai choisi de suivre la voie de mes parents. Je connais le métier. Mais le loup ? Je ne suis pas préparée. Ici, on connaît le renard, mais pas le loup. Plus haut, ils sont habitués, mais nous, on mettait nos bêtes dans un enclos et c’est tout. Je ne sais même pas trop comment marche l’indemnisat­ion. » Quand elle a décidé de s’installer à son compte, la Cannetoise s’est endettée. Aujourd’hui, elle craint pour la poursuite de son activité même si, heureuseme­nt, « mes parents m’aident beaucoup. » « Il faut bien comprendre qu’être bergère, c’est faire naître ses bêtes, les nourrir, s’en occuper, insiste la jeune femme. Les agneaux qui sont là sont nés dans mes mains. Je me souviens de la venue au monde des petits que je vais devoir achever à cause leurs blessures. » L’éleveuse craint d’être confrontée à des attaques de plus en plus fréquentes. « Les loups sont là, il faut en avoir conscience. Dans des temps anciens, on les a chassés parce qu’ils étaient agressifs avec les troupeaux et les humains. Aujourd’hui, ils sont de retour. Mon métier serait d’élever des moutons pour les retrouver fracassés ? Quand ma famille a commencé l’élevage au Cannet, il n’y avait pas le loup. Aujourd’hui, j’estime que ce n’est pas à moi de partir ! »

ANNE DUJARDIN adujardin@nicematin.fr

1. Il ne nous a pas été possible de joindre les agents du service afin de nous faire confirmer leurs conclusion­s officielle­s.

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Sept bêtes sont mortes. Une vingtaine devra être euthanasié­e. « On ne peut pas les soigner », explique Anaïs Féménia.
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(Photos A.D. et DR)

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